Réalisé par Danny Boyle en 2003, 28 jours plus tard avait lancé un féroce pavé dans la mare du film de zombie – genre auquel il n’appartient d’ailleurs pas formellement. Son successeur saurait-il se montrer digne d’un tel film, la rage aux dents (et c’est le cas de le dire), et sans pitié pour ses personnages ? Sans révolutionner le genre comme son prédécesseur, 28 semaines plus tard ne démérite aucunement du cahier des charges instauré par le film de Boyle.
L’Angleterre a subi depuis quelques mois une épidémie de rage transmissible à l’homme qui a transformé la perfide Albion en un champ de ruines dans lequel errait des êtres auparavant humains, devenus fous enragés suite à l’action d’un virus terriblement virulent. Donald Harris (Robert Carlyle), hanté par le fait d’avoir dû laisser sa femme aux mains des enragés, va retrouver ses enfants dans la zone sécurisée et militarisée de Londres. Mais la forteresse pourrait se trouver devenir un piège, si le virus réapparaissait…
La carrière de Danny Boyle oscille entre le bon (Trainspotting, Une vie moins ordinaire), le prometteur mais raté (Sunshine) et le raté tout court (La Plage). Dire que l’on n’attendait que fort peu le réalisateur sur un film d’horreur terriblement efficace tel que 28 jours plus tard tient du doux euphémisme. Belle surprise donc que cette (énième) variation sur le canevas de Je suis une légende, 28 jours plus tard était parvenu, grâce à une utilisation novatrice du montage, une absence impressionnante de pitié pour ses protagonistes et un sens du rythme remarquable, à renouveler le genre du « film de zombies » au sens le plus large du terme. Une suite, probablement inévitable mais sûrement pas indispensable, avait donc fort à faire pour s’élever au niveau de l’original, sans parler de le surpasser. Et c’est indéniable, 28 semaines… ne restera pas dans les annales au même titre que son prédécesseur, que cela soit dit. Est-ce pour autant que le film est mauvais ? Loin s’en faut.
Comment renouveler le matériau originel de la série ? Voilà la question qui vient à l’esprit de quiconque considère un instant l’idée d’imaginer une suite à 28 jours… Et c’est là que ce nouveau film est très malin : il ne s’agit pas de renouveler l’intrigue. Fondamentalement, le film fait chronologiquement suite à son prédécesseur, avec les mêmes enjeux (survie, capacité de réagir face à la rage…) mais, et c’est là le secret de la réussite qu’est 28 semaines…, pas dans les mêmes conditions. La séquelle se focalise avant tout sur ce que son scénario lui apporte de nouveau : une zone fermée et donc parfaitement claustrophobique (on pense très fort au Jour des morts vivants de Romero), la mainmise des militaires sur la situation (ce que craignait plus que tout Jim, héros du premier film), et surtout un nouveau rapport des protagonistes face à la maladie. Dans cette Londres renouvelée, la maladie ne peut pas attendre les habitants, au grand jamais. Et pourtant… 28 semaines plus tard se dote au passage d’une galerie de personnages passablement crédibles, humains, voire attachants – mais n’en use pas autrement que le film original : sans la moindre tendance à vouloir leur sauver la mise, ni à vouloir leur faciliter les choses. On meurt beaucoup dans 28 semaines…, plus souvent du fait de ses congénères humains non infectés que des enragés. C’est inévitable, semble dire le film, lorsqu’on place une société – si cloisonnée qu’elle soit – entre les mains des militaires.
Efficace au possible, jouant avec finesse de ses situations et de ses décors, conservant le côté enragé et franc-tireur (on pense souvent à la gratuité de certaines morts dans Assaut de John Carpenter) de son prédécesseur, 28 semaines plus tard n’est inférieur à son original que du fait de l’absence d’originalité de son sujet, et surtout parce que le réalisateur Juan Carlos Fresnadillo semble vouloir singer le style de son prédécesseur. Là où Boyle nous enfonçait dans nos sièges avec une esthétique agressive, sombre et stylisée (pillée depuis par l’inutile Armée des morts de Zack Snyder, d’ailleurs), Fresnadillo ne se permet de se laisser aller à la folie qui sied à son sujet que dans une scène terrible, tout en claustrophobie, où le virus se répand à une vitesse ahurissante dans les rangs de malheureux placés en quarantaine dans un parking mal éclairé. Une scène remarquablement efficace, et qui montre que 28 semaines plus tard eût aisément pu être encore plus pertinent et jouissif qu’il n’est aujourd’hui. En l’état, le film reste malgré tout une excellente surprise, pour un film de ce genre autant que pour une séquelle, et la preuve éclatante, après Batman, le défi de Tim Burton, que les « numéro 2 » ne sont pas toujours condamnés à la redite et à la médiocrité.