Deuxième film réunissant le réalisateur Vincent de Brus et l’acteur Christian Clavier, L’Entente cordiale tente de renouveler avec peine le sempiternel duo de choc comique (Depardieu-Richard, de Funès-Bourvil) en invitant Christian Clavier, aristocrate, à s’entendre avec un traducteur, Daniel Auteuil, dans une histoire d’espionnage. De la mise en scène à l’interprétation, L’Entente cordiale, pourtant contemporain de notre époque, apparaît bien daté.
Le cinéaste a donc déniché un scénario qui renvoie aux films désuets des années 1960 et 70 : espionnage, services secrets et diplomatie, Londres, disputes entre les deux héros, amitié forcément mais pas trop, argent, Élysée, patrie. Du passéisme se faufile à chaque plan, donnant un peu de ringard à ces vieux messieurs, sans relief, sans aspérité, sans humour… fatigués peut-être. Les dames qui gravitent autour de nos héros n’ont ni la gouaille, ni la fantaisie, ni le charme de toute silhouette féminine secondaire. Le cosmopolitisme du film n’emporte que peu l’adhésion tant poncifs et idées reçues pour désigner le Géorgien, l’Hindou, le Français, l’Anglais, lassent beaucoup. L’intrigue même est fort peu captivante : histoire d’un François de la Conche, Français de souche évidemment, qui reprend du service pour la France en se rendant à Londres pour une transaction délicate (échange argent contre puce qui tue toute sensation en l’être humain, avancée technologique, nous est-il précisé, pour mieux combattre l’ennemi – métaphore prémonitoire d’un spectateur qui paie sa place pour ne plus rien ressentir!). Il est alors accompagné par un interprète parlant quatre langues, un homme à femmes et à dettes, Jean-Pierre Moindrau. La surprise n’est pas l’apanage des scénaristes et la suite du récit ne comble guère l’ennui. Les dialogues enfin sont petitement écrits et évitent de justesse les bons mots.
La réalisation n’est pas en reste qui utilise le split-screen (écran divisé en deux ou trois), magnifié chez Abel Gance, popularisé avec brio dans L’Affaire Thomas Crown (Norman Jewison, 1967), systématisé par Brian De Palma et vulgarisé par la publicité (et Cédric Klapisch). Ici, aucune majesté, aucun panache, le split-screen se meurt avant même d’avoir été utilisé. Seulement quelques plans sont travaillés de cette sorte et n’aboutissent pas à une meilleure compréhension de l’intrigue. Une idée que le réalisateur en a fait des « m’as-tu vu, me voilà » ! Enfin, pour tenter de faire oublier la banalité du film en général, des décors luxueux sont servis par des images léchées. Hôtel 5 étoiles, paysages londoniens, château français, Élysée, la richesse de la production nuit fortement à la mise en scène qui n’invente rien, ne risque rien, ne propose rien.
Ce long métrage a cependant l’insigne mérite de mettre en valeur les petites comédies françaises fauchées avec acteurs irrésistibles, dialogues aguichants, situations rocambolesques et séquences bien ratées (penser que L’Entente cordiale n’a même pas l’humilité d’être un navet!)… tous ces petits films qu’il va nous falloir suivre (de Nos jours heureux à La Jungle, sorties prévues pour les vacances).