On arrive toujours un peu à reculons dans ces festivals à thèmes séparatistes comme ceux des « Trois Continents » – Afrique, Asie, Amérique latine –, du « Cinéma du Réel » (qui fêtait lui aussi sa 36e édition en 2014), du « Film de Femmes de Créteil » (36 ans toujours : pas de doute, le champ de bataille idéologique des années 70 aura bien laissé le cinéma en morceaux…) ou encore les festivals dédiés à « la jeune création » comme Brive et Bordeaux, plus récents – les ados de la familles. À distance, tout cela confine au régionalisme rance, et il y a de quoi faire la moue devant ce débitage du territoire cinématographique en départements. Dans le cas du Festival des Trois Continents (F3C), on redoutait le concert de gouzigouzis tiers-mondiste et les colliers de coquillettes kirghizes : comme des parents gagas s’extasieraient du dernier gribouillage de leur mouflet de petite section. Car depuis les années 1980, Cannes et les grands festivals généralistes ratissent large, n’hésitant pas à hisser haut le pavillon des pays émergents, quitte à n’en laisser que des miettes, et pas les plus croustillantes. Triste destin pour Nantes, qui fut pourtant la première escale européenne des Hou Hsiao-Hsien, Souleymane Cissé, Darezhan Omirbaev, Abbas Kiarostami, Elia Suleiman, Wong Kar-wai, Hirokazu Kore-eda, Jia Zhangke et Wang Bing, aujourd’hui au sommet de la short list olympienne des Venise, Locarno et Thierry Frémaux, à mille lieues de leur premier port de mouillage. Il faut dire qu’en lumen, la « Montgolfière d’or » fait pâle figure comparée au rayonnement qu’apportent les Lions, Ours, Léopards et autres palmipèdes 24 carats de la ménagerie élitiste. Pour survivre, deux positions (ou stratagèmes) s’offrent alors aux anciennes gloires des festivals thématiques : l’élargissement (option darwinienne) ou le protectionnisme (option sommeil dogmatique). À titre d’exemple, pour éviter de boire la tasse dans l’écume du leader « Cinéma du Réel », et avec les « Visions du Réel » au train, le « FID de Marseille » (vingt-six printemps au compteur, autrefois dédié au doc) ainsi que le « CPH : DOX » (12è édition cette année) louchent depuis peu sur la fiction et l’expérimental. Une opération qui a su porter ses fruits, puisque fort de son image de terre d’accueil des films mutants acquise sous la présidence de Jean-Pierre Rehm, le FID s’est adjugé la première nationale de Mille Soleils de Mati Diop.
Et Nantes dans tout ça ? Souplesse ou recroquevillement ? Par les temps qui courent, tout portait à croire que l’événement se trouverait dos au mur, mais c’était sans compter sur le nouvel haïku de Hong Sang-soo, au catalogue d’un F3C qui s’est offert du sursis. Évidemment couronné, à raison, Hill of Freedom sacrifiait la compétition sur l’autel de la renommée du festival. Comme Wang Bing en 2012 et 2013, qui hérita lui aussi par deux fois de la Montgolfière (d’argent, puis d’or), on se doute bien que la présence du Coréen se fait au prix d’un calcul opportun : assuré d’empocher le premier prix d’un rendez-vous réputé, il sera cette tête à épingler au plus vite sur le « Hall of Fame », afin d’offrir au festival une chance de survie. Un échange de bons procédés en somme. Car après cinq ans de vache maigre, entre 2007 et 2012, le F3C est contraint de se tourner vers des valeurs sûres ; quitte à rappeler d’anciennes pépites à la rescousse. Pas d’élargissement envisagé, donc, mais une intégrité thématique que Nantes paie au prix d’un pacte faustien. Reste à savoir à quoi se mesure la qualité d’un bon festival, quelle que soit sa dimension. Dans le meilleur des cas à sa compétition, part que les petits ne peuvent disputer aux plus gros, à cause du jeu des premières nationales ; mais aussi à son univers et ses programmations annexes, terrains sur lesquels la 36e édition du F3C tire brillamment son épingle du jeu. Il faut dire qu’avec un Chaplin assassin, Johnny Walker en turban, Mickey Rourke et des courts sénégalais aux faux-airs de pubs griffées Jean-Paul Goude, on ne regrette pas le déplacement.
Hong sans-le-sou, mais triple épaisseur
Champion incontesté du cinéma des fins de mois, rien n’arrête Hong Sang-soo dans son marathon du less is more. Avec Hill of Freedom, septième film en quatre ans depuis Oki’s Movie (2010), le coréen semble recroqueviller son système formel (et économique) dans ses confins : le cinéma en kit. Il fait ainsi rentrer le drame de Mori, jeune Japonais filandreux venu reconquérir sa petite amie en Corée, dans un théâtre de poche à hauteur de tatami dont la cartographie sentimentale tient en une bento box. Un café japonisant, illusoirement baptisé « Hill of Freedom », et le patio d’un motel de famille forment ainsi les deux bornes de l’errance de Mori, qui fait son nid des points aveugles du récit. L’attente trouve son petit rythme languide, et l’humour s’extrait nonchalamment d’une dispute, d’une scène d’humiliation ou d’une situation fantasque, sans que jamais le nuage d’inquiétude ne se dissipe. Un passage, le plus dérisoire et le plus beau du film, reflète à lui seul cette alchimie des affleurements. Après avoir couché avec la serveuse du café qu’il fréquente, Mori se retrouve enfermé dans les toilettes, piégé dans une situation ridicule qu’exacerbe l’affolement de la jeune femme. De l’autre côté de la porte, le plan s’attarde sur lui les yeux dans le vague, plongé dans le silence et assis sur la cuvette, tandis que les coupons du rouleau de papier toilette frémissent dans un courant d’air. En un raccord, la cocasserie laisse le champ libre au blues du PQ : la situation s’apprête à héberger un comique qui lui semblait acquise, mais c’est bien la mélancolie qui joue les trouble-fêtes, et vaporise les encens de deuil dans les waters. Ainsi s’agence la kitchenette de Hong Sang-soo, tout en tiroirs à doubles fonds et cloisons de papiers, où un raccord et une porte suffisent à replier le comique sur la tristesse, sous le patronage du dérisoire.
Exactement ce que fuit Gyeongju, l’autre film coréen de la compétition – et faux jumeau de Hill of Freedom – qui n’hésite pas à tartiner ses arlequinades poussives et la déambulation élastique de son personnage sur 2h15, quand Hong Sang-soo dépasse de six minutes seulement le seuil symbolique du court-métrage. À lui l’os, à Zhang Lu le gras d’un scénario double qu’on croirait écrit deux fois et traités de deux manières différentes : le premier sur un ticket de métro, réalisé par un cinéaste fauché, le second sur un ticket de métro, réalisé par un cinéaste fauché qui prendrait chaque mot de sa feuille de route au pied de la lettre. Ainsi s’épanche la flânerie traîne-savate d’un prof de sciences politiques émigré à Pékin, de passage dans sa ville natale de Corée, Gyeongju, pour l’enterrement d’un ami de jeunesse. Lu étale son peu de pâte comme on élargit un fond de tarte au rouleau à pâtisserie, jusqu’à obtenir un long ruban très lisse, sans grains, sans reliefs, et sans épaisseur. Le film enfile ainsi toutes les perles de la bluette noctambule certifiée « cinéma d’auteur », et charge la mule de sa romance façon coupe d’épée dans l’eau à grand renfort de poupées de chiffon lunaires (une jeune femme dans les nuages, piochée dans une maison de thé) et des secrets de polichinelle – le héros se révèle LE grand spécialiste asiatique de sa discipline, la serveuse cache une voix de velours, pour changer des clichés sur les provinciaux et leurs ambitions qui plafonnent au karaoké ; son mari est mort, il lui ressemble, ils vagabondent et se désirent mais ne se touchent pas, blablabla. Le canevas, au départ copie conforme de Hill of Freedom, s’en éloigne sous l’effet somnifère de son académisme de dilatation. Consternant, quand on compare le résultat insipide aux effets de la palette riquiqui de Hong Sang-soo, qui en quelques zooms traduit le désordre intérieur d’un personnage égaré dans un courant d’air. Gyeongju repart bredouille, éclipsé par un autre conte mortuaire qui partageait pourtant les mêmes tares « d’auteurisme de festival » que son concurrent.
Toujours en compétition, dont il empoche la « Montgolfière d’argent », Les Chants de ma mère d’Erol Mintas file le coton bien connu de la fable politique sans s’épargner aucune porte ouverte. Soit l’histoire d’une vieille femme kurde, rapatriée par son fils à Istanbul depuis le Kurdistan où la répression turque se radicalise. Une affaire de mal du pays, résumée en deux-trois figures imposées qui tournoient dans un schéma carrousel. Sans inspiration, Mintas s’en remet à des conventions de style, avec notamment le « faux plan fixe » : simulacre de caméra à l’épaule qui a tout du plan fixe, le tremblement gratuit en plus, pour mieux souligner son ancrage naturaliste, qui cache ici, comme souvent, un retrait de la mise en scène. Il faut redire, après tant d’autres, combien demeurent lassants ces jeux de reconnaissance esthétique, et combien la faillite de ces réalisateurs sans vision propre n’échappe plus à personne. Dommage, car l’histoire de ce petit fantôme emmitouflé dans ses linceuls parvient plus d’une fois à nous arracher un sourire de tendresse, et sa mort effective, au lendemain d’une soirée télé à rire devant le Kid de Chaplin, contenait en une ellipse toute la beauté de ce personnage dont la vie tient à un fil de chagrin – littéralement morte de rire. Une compétition assez décevante, de l’aveu des habitués, incapable de s’immuniser contre un sentiment de déjà-vu que l’on redoutait un peu. Et ce n’est pas Monte Adentro, documentaire sur les « mules » de Colombie passant au hachoir son mythe de Sisyphe (avec une séquence joliment symbolique, mais charcutée, d’ascension impossible d’un petit cheval blanc chargé plus que de raison), qui nous fera changer d’avis. On préférera retenir le papier toilette triple épaisseur, aux prétentions obèses de réalisateurs interchangeables. Heureusement, le F3C ne s’arrêtait pas là, et toute sa vitalité attendait les curieux dans les absides de la grille, à l’écart des remugles d’auteurisme du chœur de l’événement.
Guru Dutt : le cocktail de l’assoiffé
Parmi neuf sélections annexes toutes très prometteuses, un choix s’imposait. Il tomba sur la programmation de Marie-Pierre Duhamel Müller, « Éclats du mélodrame », dont le travail de défrichage permettait de découvrir (ou redécouvrir pour les plus érudits) deux films magistralement restaurés : Sœurs de scène de Xie Jin, et surtout L’Assoiffé de Guru Dutt, qui souffla sur la cité nantaise les excès conjugués du burlesque et du désarroi dans l’écrin d’un mélo cartoonesque qu’il ne fallait manquer sous aucun prétexte. Retour en quatre ingrédients sur la recette (imaginaire) d’un ovni qu’on aurait tort de boudiner dans un paragraphe :
1. Prendre un artiste maudit, génie de son temps, suicidé à l’âge de 39 ans après huit films réalisés entre 1951 et 1959 : Guru Dutt – à qui le festival d’Amiens vient de consacrer une rétrospective complète. Ce réalisateur-acteur relativement peu connu en occident, compte pourtant parmi les plus grands du cinéma hindi. « Inventeur » d’un cadrage très serré rebaptisé « plan Guru Dutt », perfectionniste au point de retourner toute une partie du film après l’insatisfaction ressentie en projection technique, sa contribution est comparable à celle d’Orson Wells pour le cinéma hollywoodien, dont les frasques personnelles feraient presque pâle figure à côté de la vie tumultueuse du natif de Bangalore. Un parcours truffé de scandales dont son propre cinéma recueille les échos : l’idylle méandreuse que vivent le poète Vijay (Guru Dutt) et une jeune prostituée à l’écran dans L’Assoiffé offre ainsi au couple une légitimité qui leur fait défaut dans la vraie vie (l’actrice en question étant la maîtresse du réalisateur). Coupable d’une trop grande confusion entre ses personnages et sa propre personne (dans L’Assoiffé, et plus encore dans Fleur de papier, calque de lui-même), le public et l’industrie le mettent à l’index, après ce qui restera comme les deux chefs d’œuvre d’une carrière jouée contre la montre.
2. Fusionner les saveurs douces-amères du pathos, de la bouffonnerie et du tragique dans une fable éprouvette aux senteurs de pot-pourri. Parce qu’avec les citations picturales kitschissimes de Vincente Minnelli, rarement les décors en stuc – qui semblent à chaque instant sur le point de s’écrouler – n’avaient parus si proche de ressusciter les fantasmagories d’un imaginaire tout-puissant.
3. Tirer sur la corde du lyrisme comme aucun réalisateur occidental n’aurait osé le faire. Outre le relativisme des conventions du genre, d’un continent à l’autre, Guru Dutt, un temps rétif devant l’incorporation de scènes chantées, devient avec L’Assoiffé l’une des références bollywoodiennes en la matière. Le film fait courir son lamento à un rythme effréné, parfois proche de la transe, tant les rappels, boucles et refrains achèvent d’entêter un spectateur depuis longtemps sidéré sous une telle décharge de candeur exotique.
4. Enfin, verser une cuillère à soupe de Johnny Walker, du surnom donné par Guru Dutt à ce conducteur de bus qui amusait les passagers de ses grimaces, imitations et hâbleries incessantes. Devenu, à la suite d’un second rôle d’alcoolique, la coqueluche du réalisateur, sa prestation de barbier arlequin (et sa chanson de cinq minutes, qui mérite à elle seule le coup d’œil) dote L’Assoiffé d’un soupçon de bouffonnerie digne des plus grands acteurs du répertoire burlesque ; de Max Linder à Jim Carrey. On ne serait d’ailleurs qu’à moitié étonné d’apprendre que la vedette de The Mask ait fait du mélange de crispation et de dégingandage de l’acteur hindi une référence secrète, tant Johnny Walker – Badruddin Jamaluddin Kazi de son vrai nom ; c’est tout de suite moins bankable – fait figure de « pair spirituel » bollywoodien du Canadien survolté. Reste que, décédé à l’âge de 80 ans en 2003, Johnny laisse la coquette somme de 300 films derrière lui ; quand Jim Carrey, malgré ses succès planétaires, présente à 51 ans la bagatelle de 267 films de moins à son actif. On souhaite bon courage aux futurs biographes du parangon comique de Guru Dutt (pour info, Wikipédia se contente d’une filmographie sélective de 15 films).
Apparition du festival, L’Assoiffé étancha notre soif de jubilation et de sensations troubles, aidé dans sa lutte contre l’inertie des films en compétition par le ballet versicolore des Sœurs de scène, dont la version restaurée vidait à chaque plan son barillet de couleurs sur un spectateur à bout portant.
Khady Sylla : un monde sans hommes (ni ethnographes)
Étincelant, le cinéma asiatique ne fut toutefois pas le seul à se faire remarquer. Le festival rendit un vibrant hommage à la réalisatrice sénégalaise Khady Sylla, disparue prématurément en 2013, dont les cinq films étaient présentés dans une sélection étendue à deux autres références dakaroises, Ousmane Sembène et Joris Lachaise. Plus convaincante seule qu’accompagnée, Khady Sylla laisse une œuvre triple composée de fictions, de documentaires et d’essais plus intimes, d’où s’élance un désir d’émancipation formel qui montre la marche à suivre à la jeune garde sénégalaise.
Témoin Les Bijoux, premier court-métrage d’influence pop, dont émane un fumet d’Hélène et les garçons (sans les garçons) et d’érotisme « Dance » porté par une actrice principale à la silhouette gracile, tout droit sortie d’une pub de Jean-Paul Goude (la ressemblance avec Grace Jones n’y étant pas pour rien). S’y joue un conciliabule vestimentaire autour de la parure que devra porter l’une des sœurs pour son rencard. Le film ne raconte rien d’autre que ce qu’il montre : une famille de femmes dans une pièce, affairée docilement à la décoration de l’heureuse élue, comme on cherche à enrober un bijou du plus bel écrin possible (pour finir en chemise ample, de peur de choquer). Les mâles, destinataires invisibles de tous ces efforts, n’existent que par le son, relégués dans un hors champ qui gronde et entre par tous les trous (le bruit du trafic où seuls les hommes conduisent, du klaxon qui sonne la fin de l’assemblée et du film). Colobane Express, le second film de la réalisatrice, emprunte le trafic dans lequel s’engouffre la gazelle sautillante des Bijoux, rejoignant à la toute fin du film son prince charmant en voiture-carrosse (à vrai dire plus proche de la citrouille que du carrosse, avec ses nuances rouilles). Alors que la jeune femme s’enfonce dans un destin de domestication, on aperçoit au second plan un parking de bus collectif jaunes et bleus : les véhicules de la « Colobane Express », « RATP » locale, dans lesquels embarque Khady Sylla caméra au poing. Véritables théâtres ambulants, les bus font office de tribunes sur roues pour des femmes largement majoritaires et plus revendicatrices que nulle part ailleurs en société. En deux films d’apparence déconnectés, Khady Sylla file la métaphore d’un monde de femmes, arpentant les contre-allées de la société dakaroise où la loi des hommes ne fait pas l’unanimité. Un cinéma « de l’intérieur », en somme : l’intérieur du village, des bus, des maisons, où l’on regarde le monde depuis sa fenêtre. Pareille vision compartimentée de l’espace sociale n’a rien d’étonnant, quand on sait que la cinéaste souffrait de schizophrénie aiguë, partagée entre son pays natal, et la culture française où elle séjourna le temps de ses études.
On pourrait s’en tenir au reproche selon lequel le cinéma africain ne serait qu’un succédané de Rouch (ce qui n’est pas totalement faux, surtout devant les films d’Ousmane Sembène, où planent les gros yeux du professeur français chaque fois qu’une voix off prend la narration en charge), mais c’est sans compter sur l’effort des plus téméraires à s’extraire des chromos pour inventer une troisième hémisphère : ni au Nord, ni au Sud, mais à l’intérieur, en creux. Une mystique formelle, plus libre et indépendante des grands gourous de l’ethnographie, plus proche d’un cinéma de sorcier (dont Mati Diop, à la suite de son oncle Djibril Diop Mambety, apparaît comme la plus digne héritière) fait de mille matières, et dont les impuretés d’Une parole simple – le dernier film de la cinéaste, coréalisé avec sa sœur – serviraient de pierre de touche, laissant le champ libre aux générations futures.
Pas vraiment élargi, malgré la présence timide d’un Darren Aronofsky au planning (toutefois justifiée par la rétrospective de Yu Lik-wai, à qui était donnée une carte blanche, qui a permis à l’Américain de se faufiler en pionnier incognito), le festival des Trois Continents reste droit dans ses bottes et tient sa position contre vents et marées dans une guerre de tranchées qui devrait voir d’ici peu les festivals tomber comme des mouches. Après le festival du film des droits de l’homme de Nantes, le festival du film asiatique de Deauville s’est lui aussi vu opposé une fin de non-recevoir pour sa prochaine édition. Pas de subventions non plus pour le Festival du Film de Paris, pourtant auréolé d’un succès d’estime pas négligeable pour un événement si récent. En descente et avec le vent dans le dos, le F3C s’offre un peu de conditionnelle, mais qu’en serait-il sans ses têtes de gondoles providentielles ? Quid de la compétition, si Wang Bing et Hong Sang-soo cédaient à l’amnésie qu’ils contractent tous, quand tintinnabule le doux ronron du zéro-six de Mr Frémaux ? La solution est partiellement trouvée, avec ces sélections attenantes de grande qualité, formant le cocon d’un festival qui refuse d’entendre parler de mutation. Soit. Il ne reste plus qu’à souhaiter aux fins limiers de l’équipe des Trois Continents de dénicher, comme leurs prédécesseurs, les graines en devenir du cinéma asiatique, sud-américain et africain, avant que d’autres n’en récoltent les moissons.