Voilà un film qui a fait son petit effet, les applaudissements très nourris lors de ses présentations en font sans doute un prétendant au palmarès et même à la palme d’or. On suit deux beaux adolescents, Kaito, le garçon, et Kyoko, la fille. Ils vont vivre leur initiation à la vie, à la mort, à l’amour, apprendre à prendre place dans le monde, tout ça sur une île paradisiaque où chaque élément est habité d’une présence divine. Liens familiaux distendus, harmonie écolo-animiste avec la nature, on retrouve toutes les thématiques de Naomi Kawase. Et son talent pour les capter avec une caméra-regard directement reliée à ses sensations. On n’est pas non plus dépaysé par les motifs de la mise en scène – donner à sentir l’épaisseur de l’air, filmer les arbres en contre-plongée et à contre-jour avec le soleil qui fait coucou de derrière le feuillage.
Il est indéniable que la cinéaste japonaise sait plonger son cinéma – ici une fiction, son travail de documentariste plus confidentiel est aussi très important – dans la matérialité des éléments, pour composer une ode à la sensibilité et à la beauté. On pourrait railler la naïveté de Naomi Kawase mais il ne s’agit pas de la question. Le souci est plutôt ici que la tension du filmage n’opère qu’en courant alternatif (parfois très intense) quand elle éclatait dans chaque plan de Suzaku (1997) ou Shara (2003). Aussi le systématisme n’est pas sans peser en s’invitant parfois comme une impression de remplissage : ici le trophée pour les plans aériens. Le discours parfois plaqué grossièrement constitue un autre écueil : il faut être humble et respecter la nature, communier avec elle, sinon gare à vous les enfants ! Est-il utile de dire d’une façon aussi insistante quand on sait faire ressentir ?