Qui connaît un peu la filmographie d’Arnaud Desplechin se doutera que Les Fantômes d’Ismaël n’est pas que le mélo aux accents bergmaniens que l’habile campagne promotionnelle du film souhaite tant vendre. Chez Desplechin, une piste narrative peut en cacher mille autres, et les effets de chausse-trappes, de miroirs déformants et de poupées gigognes sont autant de tours de passe-passe que ce grand enchanteur distille avec un savant mélange d’humour et d’âpreté. Le cinéma de Desplechin est résolument unique et irréductible aux nombreux qualificatifs que l’on serait tenté de lui assigner, et Les Fantômes d’Ismaël ne déroge pas à la règle. S’y mêlent tout à la fois la fiction pure et les accents autobiographiques, la filiation avec la propre filmographie du cinéaste et les hommages à ses maîtres (Bergman, Hitchcock), et cette manière si singulière de représenter l’intime, à la fois rêche et lyrique, et de réunir dans le même mouvement le tragique et l’absurde, la comédie et le drame…