Summer White, titre choisi pour l’exploitation internationale, ne retranscrit pas le double sens de l’original, Blanco de verano. Ce blanco désigne d’abord la couleur de la peinture avec laquelle Valeria repeint le mur de son salon, métaphore d’un bouleversement inacceptable pour son fils Rodrigo, adolescent renfrogné et solitaire avec qui elle vit une relation fusionnelle. Mais blanco, en espagnol, veut aussi dire « cible » : blanco de verano désignerait alors également la cible de l’été qu’est Fernando, le nouveau petit ami de Valeria, qui menace la vie commune de la mère et du fils lorsqu’il vient habiter chez eux. Le premier tiers du film, le plus réussi, dit d’abord la tendresse de cette relation mère-fils, interrogeant subtilement une proximité parfois ambigüe : Rodrigo, treize ans, va rejoindre sa mère dans son lit lorsqu’il n’arrive pas à dormir, l’embrasse sur la bouche pour lui dire au revoir, ou se brosse les dents à côté d’elle, seins nus. Comme cet adolescent peu loquace, la narration est économe et dépouillée. Dans un premier temps, les cadres très serrés sur Rodrigo, dont le film adopte le point de vue exclusif, semblent uniquement dessiner le portrait de sa fragilité et de son attachement maternel, joliment illustré dans l’une des premières séquences où la mère apprend à danser à son fils. Alors qu’il se prend au jeu de cette danse d’ordinaire destinée aux couples, ils sont interrompus par l’irruption de Fernando. Le réalisateur, Rodrigo Riuz Patterson, n’insiste pas sur d’éventuelles explications aux premiers actes hostiles de son héros à l’égard du compagnon de sa mère, et par là dit justement l’impossibilité de mettre parfois des mots sur des sentiments. Le film repose alors sur cette belle idée que l’adolescence est autant une période de construction que l’effondrement d’un monde, où la parole se fait rare – si ce n’est inexistante –, mais où pourtant la tendresse peut surgir d’un timide geste, d’un mot, d’un regard.
Le film prend cependant rapidement la forme d’une accumulation de scènes opposant Rodrigo et Fernando, qui essaie – en vain – de devenir un père de substitution (le vrai père n’est évoqué que comme une menace). La mère est alors éclipsée du récit et surgissent des sous-intrigues sans relief (exemplairement, l’apprentissage de la conduite de Rodrigo). Patterson finit par passer à côté de son sujet en s’attardant sur cette non-relation : dès lors, l’incessant mutisme de Rodrigo sonne faux, laissant quantité de scènes inachevées desquelles il ne ressort rien. L’esthétique de la proximité qui faisait tout l’intérêt de la première partie, Patterson filmant quasi exclusivement Rodrigo en gros plans, semble quant à elle ne plus participer qu’à une esthétisation prétexte à toutes les plus mauvaises métaphores visuelles. Ainsi du feu qui évoque sa soif de destruction lorsqu’il essaie de s’immoler ou qu’il brûle le camping-car que lui offre Rodrigo, mais aussi de divers lens flares ou jeux de mise au point avec une très courte profondeur de champ, soulignant grossièrement les émotions du personnage.
Tout cela ne fait plus de Summer White qu’un drame œdipien quelque peu consensuel et convenu, dont le plus dérangeant est peut-être la morale en forme d’impasse : Valeria et Rodrigo dansent comme au début du film, « à nouveau » réunis, mais dans la douleur, puisque Fernando a été évincé. Et ce sans aucune autre forme de réflexion sur la toxicité de cette relation, ni sur les torts de l’éducation de cet adolescent dont l’acharnement destructeur a fini par triompher.