Pour sa nouvelle livraison de SF vintage, Artus nous propose Destination : planète Hydra, de Pietro Francisci. Réalisé en 1966, le film semble vouloir faire partie de la tendance bien connue du cinéma bis italien de ces années-là, à reprendre à bon compte les ingrédients à succès du cinéma mieux pourvu financièrement, et à en accentuer les aspects les plus vendeurs (ici donc : l’argument de science-fiction et les tenues vaporeuses de ses actrices) pour faire un carton commercial.
Aux commandes de celui-ci, Pietro Francisci est un choix moins étonnant qu’il n’y paraît : auteur de plusieurs péplums parfaitement fréquentables – même si souvent fauchés –, le réalisateur, novice en SF, n’a pas à se forcer pour transposer dans Destination : planète Hydra des éléments narratifs finalement assez neutres (voyage au long cours en tant que prisonnier, affrontement avec des périls en chemin, réorganisation idéologique du groupe…), qui pourraient tout aussi bien sortir d’un Maciste ou d’un Hercule. Il ne s’agit donc pas de changer grand-chose, sinon l’habillage esthétique – et c’est indéniablement là que se singularise Destination : planète Hydra, tout d’abord avec des effets spéciaux spatiaux pour le moins naïfs (les protagonistes filmés rebondissant sur des trampolines au ralenti pour simuler l’apesanteur…).
Pourvue quant à elle d’une garde-robe à l’exotisme extra-planétaire enviable (et accompagnée d’hommes de main aux uniformes « SF sixties » très convaincants), la sévère Leonora Ruffo pâlit cependant devant la débauche de tenues délirantes réservées à Leontine May, héroïne un rien gourde mais manifestement en quête d’un conjoint dans tous les coins de l’écran. Si le film se concentre sur son personnage – et revêt par là même les oripeaux d’une friandise bis et kitsch, il convient de fureter plus précautionneusement au second plan du film.
Bis à tiroirs
Nourri aux classiques du genre des années 1950, Destination : planète Hydra cite à tout va – allant même jusqu’à une hilarante irruption simiesque qu’Alain Petit, dans les bonus, rattache plus volontiers au roman de Pierre Boulle qu’au film de La Planète des singes, à l’époque encore à venir. Le sourire en coin, Alain Petit ne fait pas mystère de sa tendresse pour un film boiteux, à la marge, magnifié pour lui par une VF résolument – et peut-être volontairement – calamiteuse (et disponible dans cette édition pour les bisseux gourmets).
Pourtant, à découvrir le film en V.O., on se prend à s’interroger sur les intentions réelles de Pietro Francisci, tant transparaît par moment le fatalisme déprimé inhérent au genre de la science-fiction – un genre qui ne regarde vers le futur que pour jeter un œil navré en arrière, sur la folie des humains. L’espace d’une séquence, où une protagoniste empoisonne le reste de l’équipage, l’assemblage hétéroclite de Destination : planète Hydra prend une tonalité sinistre, désabusée, et prenante – mais non. L’effet n’était que temporaire, tous se réveillent, le finale se permet une utopie libre et pacifiste – à 50 ans de distance, on ne saurait trancher : naïveté débordante, respect et connaissance du genre dissimulé en film à la rentabilité assurée. Probablement les deux : du cinéma bis comme on l’aime, en somme.