Les vacances d’été pointent le bout de leur nez, et avec elles, les grosses superproductions américaines et les comédies estampillées « qualité française », qui tenteront d’attirer un spectateur plus avide de soleil et de sable que de salles obscures. Le premier long-métrage d’Anne Fassio fait évidemment partie de la deuxième vague : si le casting de stars « secondaires » n’est pas très porteur (Élodie Bouchez, Valérie Benguigui, Axelle Laffont), le sujet, sorte de vidéo familiale du parfait ratage de vacances, l’est pour deux. Étonnamment, Je déteste les enfants des autres réussit à séduire là où l’attend le moins, par un tour de passe-passe malicieux : éviter de trop en dire sur un sujet sans intérêt.
Cécile, Louise et Pénélope, trois copines trentenaires, ont décidé de partir en vacances ensemble dans une maison de campagne en Ardèche. Mauvaise idée : non seulement la maison en question n’est pas conforme à leurs lois du confort (d’où gags), mais surtout, elles sont toutes trois affublées d’une marmaille insupportable et pourrie gâtée (d’où, re-gags). Avec l’aide de Fred, le mari de Louise, elles vont tenter de composer avec les exigences dictatoriales des sept mômes et passer tout de même deux bonnes semaines, reposantes et régénérantes. Peine perdue…
Chacun a connu ce genre de vacances au moins une fois dans sa vie, qu’il ait joué le rôle de l’adulte rentré plus fatigué de son été au soleil qu’il ne l’était en partant, ou du gosse brailleur dont les seules préoccupations sont « quand est-ce qu’on arrive » et « quand est-ce qu’on mange ». Anne Fassio avance sur un sujet bien balisé, jouant sereinement sur le sentiment d’identification du spectateur. Le titre de son film peut bien promettre une vision légèrement cynique de la société, le politiquement incorrect n’est pas à l’ordre du jour : Je déteste les enfants des autres tire sa substance des situations les plus banales de la vie quotidienne, au point de ressembler le plus souvent à une vidéo familiale.
Comme tant d’autres comédies du même genre, le scénario enchaîne les sketchs aux chutes ultra téléphonées et les crises d’hystérie résolues sur un dénouement doux-amer (réservons le véritable happy-end à ces sacrés optimistes d’Américains). La faute surtout à l’écriture trop stéréotypée des personnages, type « Sex and the country with children » : Cécile, Louise et Pénélope sont clairement censées représenter trois types de femmes modernes. Cécile est partie sans son cher et tendre, car elle se pose des questions sur son couple ; Louise prétend connaître la recette du bonheur parfait, mais ne s’illusionne-t-elle pas ? Quant à Pénélope, elle élève seule ses deux enfants, nés de « deux coups d’un soir », et enchaîne les mecs, tout en rêvant, bien sûr, au grand amour…
Si Anne Fassio ne dit rien de nouveau sur le couple ou l’éducation des enfants, elle n’en a heureusement pas l’intention. En se limitant à une mise en scène banale mais sans prétention, la réalisatrice parvient à éviter les situations caricaturales. Sa vision réaliste et tendre de l’enfance est sa plus grande réussite : jamais béate devant ses jeunes comédiens, elle échappe au cliché « graine de star » caractéristique de la plupart des productions familiales. Surtout, Je déteste les enfants des autres est un film entièrement dépourvu de toute idéologie, où l’on parle réellement pour ne rien dire, sans considérations hors de propos sur la vie et les relations amoureuses. Et c’est ainsi que la comédie franchouillarde qu’on aurait aimé détester se transforme en petit film divertissant, vite oublié mais agréable à regarder.