Premier long-métrage de Pippo Mezzapesa, Annalisa met en scène deux jeunes garçons italiens que tout semble a priori opposer et qui vont pourtant vivre ensemble une aventure peu commune. Surchargeant les deux portraits d’une symbolique qui pèse davantage sur le film qu’elle ne lui offre l’ampleur attendue, le réalisateur s’affranchit difficilement des archétypes et clichés propres à l’adolescence.
Veleno et Zaza sont deux adolescents de quinze ans vivant dans le sud de l’Italie. Fils de notable, le premier pâtit d’une image de garçon bien élevé et trop propre sur lui qui en fait la victime préférée de ses camarades de jeu. Quant au second, il est issu d’une famille de malfrats qui vit de petites combines et ne voit son salut qu’à travers le football, sport où il excelle. Alors qu’a priori rien n’était censé rapprocher les deux adolescents, va pourtant se nouer entre eux une amitié aussi improbable qu’indéfectible. L’apparition d’Annalisa, belle femme mystérieuse, quintessence d’une figure féminine faisant écho à l’inexpérience des deux jeunes garçons en la matière, va sceller puis – forcément – jeter le voile sur cette étrange amitié que chacun croyait pourtant parée à encaisser toutes les épreuves.
Nul doute sur les intentions du cinéaste qui, à travers le portrait évanescent d’Annalisa, souhaitait avant tout capter quelque chose de la fougue adolescente. Cet âge de la vie, s’il a été négligé par le cinéma jusqu’à la fin des années 1950, est devenu depuis un thème à part entière, s’affranchissant des genres et des nationalités. Pippo Mezzapesa, en convoquant ce type de figures, fait donc le choix de prendre en charge tout un pan du cinéma (italien compris). Seulement, il s’affranchit difficilement de ce que les productions de ces cinquante dernières années ont pu créer comme lieux communs sur la douleur adolescente. Sans vraiment trouver un ton personnel, le réalisateur multiplie les effets (photographie, mouvements de caméra, ralentis), révélant finalement la relative vacuité du projet. À défaut d’une véritable incarnation, Annalisa renouvelle les clichés du genre (idéalisme, transgression, etc.) sans susciter le malaise ou l’émotion attendus.
En lieu et place d’épaisseur psychologique, on aurait pu espérer que l’ancrage social du film dans le sud d’une Italie en crise apporte au film un corps et un mouvement qui, en dépit des efforts manifestes du cinéaste, n’existent pas vraiment. Se contentant de quelques scènes au symbolisme éprouvé, Pippo Mezzapesa préfère tout miser sur le personnage soit-disant mystérieux d’Annalisa, jeune femme par qui le premier émoi arrive. Sublimée (jusque dans une scène de tentative de suicide à l’esthétisation douteuse), elle incarne un fantasme vieux comme le monde d’une féminité pure (entendons par là, vierge, puisqu’elle est devenue veuve avant de s’être mariée), capable de ramener les âmes perdus (les adolescents, donc) sur le divin chemin de l’élévation. Le cliché pourra séduire celles et ceux pour qui ce type de figure fait encore sens. Les autres pourront passer leur chemin sans trop de regrets en se disant que ce pain-là a aujourd’hui un goût légèrement rance.