Depuis Shrek (Andrew Adamson, 2001) et sa version quelque peu anticonformiste d’un conte de fées, les studios d’animation n’ont de cesse de vouloir, à leur tour, donner leur délire — scénaristique et dessiné — d’un Jack et le haricot magique, Belle au Bois Dormant, Petit Chaperon rouge (Tex Avery, entre autres, a fait ainsi des émules !). Après la sortie du Blanche-Neige la suite de Picha (2007) un tantinet coquin, voici Cendrillon la suite, joliment drôle.
« Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. » Cette phrase, point final de tous les contes, devient donc le ferment d’un autre possible… et si Cendrillon n’avait plus la même destinée ? Paul J. Bolger, plutôt connu pour la réalisation de séries télévisées, jeux vidéo et autres publicités, s’attelle ainsi à la tâche de faire revivre la souillon cendrée et sa marâtre fatale.
En effet, la méchante belle-maman de Cendy surprend par hasard le secret qui entoure chaque conte : Wizard le magicien lit et visionne les différents récits de princes et de princesses. Avec sa balance du Bien et du Mal mais aussi armé d’un sceptre ensorcelé, il fait en sorte que tout se finisse toujours merveilleusement. Fort de ce qu’elle n’aurait jamais du savoir, Frieda la maléfique marâtre prend les rênes du pouvoir et espère ainsi mettre un point final désastreux à chaque conte de fées, en particulier celui titré Cendrillon ! Appelant à la rescousse les loups et autres trolls, elle fait face à sa belle-fille, Cendy, très Audrey Hepburn, et réunit sans le vouloir la jolie enfant avec un beau plongeur de cuisine. Le Prince, quant à lui, musclé, blond et idiot, recherche encore sa princesse.
Jouant délibérément de tous les contrastes (petit-grand, fort-faible, beau-laid, malin-idiot…), le film de Paul J. Bolger s’appuie sur un scénario qui est tiraillé entre des situations et des dialogues d’inégale saveur. Quelques réparties cocasses n’arrivent pas forcément à faire le poids face à la bêtise de certaines répliques. Le premier quart d’heure du film est en cela exemplaire : commençant exactement son récit comme l’a fait Picha dans son Blanche-Neige la suite, par une mise en abyme, le réalisateur joue sur la distanciation — le film dans le film — en usant d’une voix off (Bruno Salomone n’est sans doute pas au meilleur de sa forme) sans aspérité et récitant un texte convenu. Mais passé ce préambule scénaristique usé et peu encourageant, le reste du film joue de quelques surprises et situations rocambolesques (la maison des nains devenue un bunker par exemple).
Quant à l’animation, elle est plutôt agréablement réussie, des décors (forêt) à l’architecture imitée de Gaudí aux personnages, tous différents, forcément caricaturaux. Le tout s’unit sans impression de rajout, de collure, la 3D devient sur certains plans réellement intéressante car elle ne manque pas de rappeler finalement d’où vient son réalisateur : du jeu vidéo. Ce film est ainsi conçu comme un immense territoire de joueur (pensons à la montée dans le donjon de Frieda, l’antre des sept nains) et c’est dès lors de cette façon qu’il faut concevoir ce délire inégalement merveilleux.