« Heureux les cœurs purs car ils verront Dieu. » Cette phrase prononcée par le père Luca dès les premières minutes annonce d’emblée le programme du film : un parcours initiatique et personnel vécu par un jeune couple d’amoureux, dont les actions révéleront petit à petit leur grandeur d’âme. Tout en pudeur et en sensibilité, le premier long métrage de Roberto De Paolis développe une love story contrariée avec un parti-pris documentaire.
À cœur vaillant, rien d’impossible
En nous contant les destins croisés de Stefano et Agnese, le réalisateur ouvre son film en décrivant deux mondes marginaux et à l’opposé l’un de l’autre. Stefano est issu des banlieues pauvres de Rome et vit de petits méfaits. Il essaye de se racheter une conduite en devenant gardien d’un parking à proximité d’un camp de Roms. Rapidement, des altercations brutales entre la communauté et le jeune homme vont se créer. De son côté, Agnese suit un programme collectif d’éducation et de préparation au mariage. Lors des cérémonies religieuses ou dans les réunions d’apprentissage, la jeune fille s’abandonne pleinement à la foi lors de scènes douces et chaleureuses contrastant avec le milieu violent de Stefano.
En réunissant ces deux mondes a priori très différents, le réalisateur parie sur un choc des cultures et une romance à contre-courant de celles-ci. Si l’imbrication des deux univers lors de la première heure ne fonctionne pas toujours, donnant la désagréable impression de suivre deux films différents se raccordant à grande peine, la dernière partie du métrage parvient à rehausser le niveau d’ensemble, grâce à l’énergie positive qu’elle dégage. En gardant toujours un regard bienveillant sur Agnese et Stefano, même dans leurs mauvaises actions (un braquage pour lui, une fausse déclaration pour elle), De Paolis se refuse à tout jugement de valeurs négatif.
À contrecœur
En développant une fiction lorgnant avec l’esthétique documentaire, le réalisateur opte pour une improvisation régulière des acteurs et filme en plans serrés, caméra à l’épaule. Le cadre n’est jamais stable ou fixe, il reste en suspension, prêt à capter le moindre souffle émergeant de ses comédiens. Si le jeu d’acteur est confondant de naturel, certaines séquences pêchent par une tendance régulière à sur-dramatiser les enjeux, en exacerbant la violence des rencontres et des relations. Le film dévie dès lors de son parti-pris initial (raconter avec pudeur et sensibilité un amour naissant contrarié) pour accentuer inutilement la misère sociale et affective vécues par ses personnages. Cette recherche d’une empathie sans doute trop forcée dénote rapidement avec la sincérité du début.
De cette contradiction naît toutefois un sous-texte politique qui se dessine avec clarté, presque avec naïveté. En étant constamment mis en parallèle, les deux territoires vierges gardés par Stefano (le parking) et Agnese (son propre corps), que ces derniers s’échinent à préserver coûte que coûte, viennent alimenter une peur de l’intrusion d’un corps étranger. À mesure que le récit se déroule, le film développe alors un message alarmiste sur la nécessité de s’affranchir des barrières que l’on s’impose ou qui nous sont forcées, pour s’ouvrir à autrui, quitte à perdre une idéologie préconçue. Ce sous-texte bien ancré dans l’air du temps nous ramène à nouveau à considérer le film pour ce qu’il est : une œuvre empreinte d’un symbolisme naïf qui déroule placidement ses convictions, quitte à rester trop anecdotique.