Comédie britannique sortant des sentiers battus par son approche documentaire, Confetti est un OVNI, une œuvre hybride à la fois originale et conservatrice, mais qui tire sa force de ce grand écart. Drôle et enlevé (mais pas seulement), Confetti mérite vraiment le coup d’œil.
Un grand magazine anglais, Confetti, propose un concours pour désigner le mariage le plus original de l’année. Trois couples sont en lice pour la finale. Le premier adore les comédies musicales, le second a la passion du tennis et le troisième est naturiste… Qui gagnera la maison de rêve mise en jeu, ainsi que sa photo en couverture du magazine ? À partir d’un sujet assez mince, Debbie Isitt réalise une comédie moderne qui fait le lien entre différents courants du cinéma anglais contemporain. En tout premier lieu, à travers l’utilisation d’un dispositif en forme de jeu peu éloigné de certains principes de télé réalité : un concours plus ou moins absurde du mariage le plus fou où les protagonistes se donnent à voir sans mesure (métaphore transparente qu’offre pour l’occasion le couple de naturistes) afin de gagner le gros lot et la célébrité.
L’état de son récit lui permet ainsi de construire un film choral où grouillent les personnages les plus divers, tous liés par ce concours. Sans sombrer dans le voyeurisme, préférant organiser une reconstitution du « genre » télévisuel, le film frappe par son aspect brut et réaliste comme arraché au réel. Par la banalité des situations qu’elle met en scène, la plupart du temps improvisées par les comédiens, Debbie Isitt réalise une première hybridation entre principe de tournage cinématographique et nouvelle pratique narrative. Loin d’être complaisante dans ce qu’elle met en scène, Debbie Isitt donne un contrechamp à ses couples placés sous le feu des projecteurs. Ce sont les deux journalistes du magazine Confetti, organisateurs du concours, cyniques, calculateurs, vénaux. Ils n’en restent pas moins attachants et terriblement humains car souvent très drôles dans leurs manigances, leurs gaffes diverses et la difficulté qu’eux aussi ont à mener leur propre projet à bout.
La réalisatrice, malgré ce parti pris, sait aussi garder le cap de la romance à l’anglaise. Développée à partir de Quatre mariages et un enterrement et son triomphe surprise en 1994, la comédie sentimentale (pour ne pas dire matrimoniale) made in England a toujours su mélanger amour fleur bleue à une approche plus acide. Confetti s’y inscrit pleinement et réalise alors un grand écart 100% british, quelque part entre une esthétique à la Ken Loach et un propos à la Mike Newell. En insérant dans la comédie la plus classique une dose de réalisme savamment travaillé, la réalisatrice apporte du sang neuf au genre et déstabilise le spectateur peu habitué à voir apparaître de telles audaces et une telle ambition cinématographique dans le cadre d’une comédie. Evitant le cliché, malgré un couple homosexuel très « Gilbert et George » qui apparaît cependant comme le ménage le plus stable de l’entreprise, Debbie Isitt permet à son film de rester fidèle à son obsession : le mariage. Tous ces préparatifs, toutes ces disputes, agissent comme des révélateurs sur les personnages, donnant plus de force à leur amour ou les plaçant face à leur entourage par forcément compréhensif, voire carrément encombrant. Se marier devient alors un chemin de croix.
Reste alors la cérémonie à proprement parler, grand spectacle kitsch que chacun espère le plus parfait et le plus extraordinaire possible. Mais dernier pied de nez (et c’est le cas de le dire !) de la réalisatrice, le style documentaire développé jusque là s’écrase contre le spectaculaire des mises en scène que chacun des couples a choisies. Rien n’a vraiment la splendeur attendue et le spectateur reste sur sa faim. À travers l’échec de sa représentation, le mariage gagne en profondeur et révèle ainsi sa vraie nature pour ceux qui le vivent. Perfection jamais atteinte, moment forcément décevant devant la passion qu’on lui a vouée avant son déploiement dans le réel, les grands mariages semblent toujours être au dessous des espérances qu’on place en eux. La représentation de l’union parfaite n’est qu’un mirage et que Debbie Isitt nous le fasse constater avec autant d’acuité cinématographique est tout simplement délicieux.