Le générique fait déjà peur. Un fœtus humain flotte dans son placenta, tandis qu’une voix off qu’on croirait sortie d’un médiocre documentaire d’histoire naturelle égrène le thème principal du film : l’atavisme. Un enfant est-il appelé à reproduire les problèmes vécus par ses parents ? Ce sujet livré d’entrée, brut de décoffrage et avec une assurance où pointe une prétention professorale, annonce un film à thèse peu subtil, qui illustrera le propos, entre autres, par des dialogues aussi lourdement explicites que le déchirant « Je ne veux pas vivre comme toi ! » ou le définitif « Tu es aussi salope que ta mère ». Ce n’est malheureusement qu’une vue tronquée de la catastrophe qui durera cent deux minutes.
« Vulgariser »
Suivant la cavale d’une mère dépendante au jeu et de sa fille qui fuient un mari/père violent aux activités douteuses, Familia se révèle un croisement entre un road-movie squelettique (quelques plans aériens sur des voyages en voiture pour donner le change), une illustration de la transmission mère/fille, et un portrait croisé de femmes sur le mode « la cigale et la fourmi » (la blonde instable et libre face à la brune travailleuse et un peu coincée). Le tout compose un mélodrame primaire qui se terminera en vaudeville, et qui se distingue vite par sa forme atrocement télévisuelle : platitude du jeu des acteurs, vacuité d’une réalisation dont l’emploi fréquent du gros plan un peu tremblant relève du procédé de téléfilm familial. C’est d’autant plus insupportable que le film fait rapidement mine d’élargir son propos et de donner un reflet partiel de notre monde moderne. Sur ce thème initial, la cinéaste décide de greffer une grosse poignée de sujets « de société » tels que la famille recomposée, la dépendance au jeu, la découverte de la sexualité, voire la pornographie sur Internet. Le dossier de presse nous apprend que Louise Archambault a été presque exclusivement inspirée par la lecture de divers ouvrages et statistiques sociologiques. On le croit sans peine, hélas : de la multitude de thèmes qu’elle brasse courageusement, Archambault n’a rien d’autre à dire que des lieux communs, à travers quelques scènes balourdes et sans force jetées çà et là, à la limite du risible, comme pressées par l’impératif de vulgariser les thèmes pour le grand public. On est bien en peine de trouver une trace de cinéma dans ce qui a plus sa place dans la grille des programmes de France 2, juste avant l’émission Ça se discute, que dans les salles.
La dernière séquence, censée conclure le point de vue du film sur le fil de la vie et la perpétuation de l’humanité, parachève l’ineptie de l’entreprise. Par un procédé proche de la publicité, elle consiste en un défilé très rapide sur fond blanc de visages souriants d’origines diverses. Tous des visages féminins. Il faut dire que des mâles, on n’en aura vu qu’une poignée dans Familia, ne comportant curieusement que des salauds méprisables. Féminisme ou manque de temps pour développer la partie masculine de ce film à thèse, l’une ou l’autre raison ne peut en rien excuser la bêtise.