Mira, orpheline d’un père marin mort en mer, se réveille un matin, esseulée par la disparition soudaine et inexpliquée de son mari douanier. Si les premiers jours sont consacrés à la recherche de cet être qu’elle croyait connaître, les suivants lui apportent une forme de libération.
Premier long-métrage d’un réalisateur israélien, Idan Haguel, Inertia est un curieux objet cinématographique : après une étrange (et très courte) hystérie introductive se dessine progressivement le portrait balancé d’une femme au quotidien dématérialisé par sa ritualisation. Les entrevues avec sa mère, les repas devant la télévision, et même le recherche du disparu cadrent Mira, la soumettent temporellement et spatialement, l’infantilisent en quelque sorte. Plans très courts, montage sec, mouvements minimalistes… Idan Haguel insiste beaucoup sur l’adéquation de son cinéma au personnage qu’il tente, tant bien que mal, de libérer progressivement. Il passe sans transition du portrait contemplatif au thriller pointilliste, et de la femme soumise à la potentielle meurtrière. Chaque sensation passe en quelques secondes, et l’on peine, de fait, à s’accrocher à un sens précis, un mouvement d’ensemble.
Rien n’interdit aux jeunes cinéastes de mener son spectateur par le bout du non-sens : mais, à force de virements de bord, l’effet de glissement ou de suggestion devient pesanteur de la juxtaposition des genres, des métaphores, et l’on finit par regretter la résonance presque trop évidente du film et de son titre. Inertia pourrait briller par son originalité mais la brandit en cataloguant ses références (notamment à Aki Kaurismäki) et en martelant sa volonté de rupture permanente. À trop casser son rythme, ses pistes narratives et son sujet, on finit par douter qu’il en ait vraiment un. L’obsession de la maîtrise est parfois aussi terrible que son absence : elle bride l’image et la réduit à une collection d’instantanés, certes travaillés, mais embrassant difficilement une œuvre entière.