Réaliser un film sur Beatrix Potter (1866 – 1943), auteur d’ouvrages fameux pour les enfants (Pierre Lapin, c’est elle), naturaliste et écologiste avant l’heure, est somme toute une gageure. Le réalisateur australien de Babe, le cochon devenu berger (1995), Chris Noonan, s’attelle à la tâche et illustre, plutôt que de mettre en scène, les bonheurs et drames de la Miss Potter. Une biographie lisse et sage.
Beatrix Potter a passé trente-six ans chez ses parents à reproduire, peindre, créer, inventer des animaux qui parlent (Walt Disney s’en souviendra). Célibataire endurcie, une gageure pour l’époque, elle vit pour ses bêtes à poils dessinées et n’attend même plus le grand amour. En 1902, elle connaît une gloire spectaculaire grâce à ses livres illustrés (J.K. Rowling accolera un Potter à son Harry pour lui rendre hommage) et reconnaît l’amour sous les traits de son éditeur, Norman Warne. Elle se fiance malgré le désaccord de ses parents mais Norman meurt peu de temps après. Inconsolable, riche, elle achète des fermes et des terres en Angleterre, fermes et terres qu’elle léguera d’ailleurs à sa mort à la National Trust, sauvegardant ainsi un patrimoine inestimable. Elle se marie cependant en 1913 et, forte de ce nouvel élan passionnel, quitte définitivement les contes, les lapins, les écureuils, les cane dessinés pour se consacrer à la nature et à son époux.
De cette vie à la fois sage et rebelle, exemplaire, Chris Noonan se penche sur les débuts littéraires de Miss Potter, sa gloire soudaine et sa rencontre avec Norman Warne. Il illustre avec joliesse et reconstitue un Londres de 1900, rues, immeubles, parcs, trains, chambres, puis cadre tout aussi joliment les paysages, les lacs, la nature. Une photographie impeccable vient suppléer à des idées de mise en image qui, malheureusement, restent par trop anecdotiques. Beatrix Potter a ainsi le pouvoir de projeter sur ses dessins, de lapin, de cane, d’écureuil, etc. des mouvements : Pierre Lapin, Sophie Canetang et les autres bougent ainsi en dessin animé. L’attention est charmante voire touchante mais ne se justifie pas. Le film lui-même, qui n’ennuie certes pas, est de la sorte sans aspérité, sans relief, gentil. La musique accompagne chaque mouvement de l’âme de Miss Potter (des rires aux larmes). Renée Zellweger, Ewan McGregor et même la délicieuse Emily Watson, illustrent également leur personnage. Une ironie pour une Miss Potter qui s’est rendue célèbre en illustrant mais un vrai dommage pour le film. La création s’est distraitement égarée au cœur des grands lacs britanniques.