La trame de Swallow entremêle thriller psychologique, intrigue psychanalytique et réflexion sur la condition féminine. Hunter, jeune femme au foyer récemment mariée à un riche héritier, développe un pica au moment où elle tombe enceinte. Cette maladie la pousse à avaler des objets de plus en plus dangereux : d’abord une bille, puis une punaise, un tournevis ou encore une pile. Tout l’enjeu du film est alors de trouver l’origine de ce mal, qui apparaît d’abord comme la conséquence probable de la situation maritale étouffante dans laquelle se trouve l’héroïne, avant qu’un traumatisme plus ancien ne refasse surface au gré de ses séances sur le divan. Pour ce premier long-métrage, Carlo Mirabella-Davis semble vouloir appliquer un peu trop consciencieusement la leçon apprise chez Bergman et Hitchcock dans une mise en scène souvent démonstrative. Il en va ainsi, par exemple, de la forme rouge à l’intérieur de l’agate que Hunter ingère au début du film et qui renvoie au sang qu’elle va ensuite expulser, ou encore de tous ces gros plans sur la nourriture, les gels obstétriques ou des substances liquides évoquant la matière fécale. Ces allusions à une forme de souillure (c’est sous cet angle que le mari de Hunter et ses parents appréhendent la maladie) prennent place au sein de cadrages rigides dictés par l’architecture moderniste de la maison du couple. S’y ajoutent une photographie privilégiant les tons froids et un jeu constant sur les éléments durs ou minéraux (le verre, le métal, les glaçons dans l’eau, etc.). Victime collatérale de cette mise à distance clinique qui donne le ton de la quasi-totalité du film, le suspense ne parvient jamais à s’installer véritablement. Le discours porté sur la condition féminine reste lui aussi à l’état embryonnaire, le réalisateur s’en tenant à un modèle d’héroïne hitchcockienne un brin caricatural qui allie la gaucherie de la jeune épouse de Rebecca au passé traumatique de Marnie. Le film revendique d’ailleurs une esthétique empruntée aux années 1950, contredite uniquement par la présence discrète de téléphones portables.
Un petit miracle s’accomplit pourtant dans le dernier quart de l’intrigue lorsque Hunter finit par fuir sa cage dorée. Avec cette échappée, le film se déleste lui aussi d’une partie de sa lourdeur. Moins encombrée par la cinégénie du décor ou par les soubresauts parfois erratiques du récit, la caméra capte enfin l’émotion sur le visage de l’héroïne. Sa quête, elle aussi, change de nature et troque son étrangeté initiale contre une nouvelle simplicité bienvenue offrant au film ses meilleures scènes (notamment celle où Hunter s’invite à une fête d’anniversaire sous le regard surpris des hôtes qui n’osent pas lui demander ce qu’elle fait là). À cet égard, le dépouillement du dernier plan qui montre le va-et-vient de femmes inconnues dans des toilettes publics se révèle bien plus éloquent que les tentatives formalistes qui constituent la majorité du film.