Du 29 novembre au 4 décembre 2004 s’est déroulé le 22ème festival international du court métrage d’Aix-en-Provence. Au programme, des films qui déclinent toutes les émotions et les genres cinématographiques, rire, peur, dérision, poésie…
À chaque court-métrage son atmosphère et son style particuliers, avec notamment la nuit du Court Fantastique (vendredi 3 – 12), le cinéma tchèque (avec Milos Forman) et des courts métrages régionaux (PACA et Auvergne). La présidente du jury, Clémentine Célarié, et les membres du jury, ont élu le palmarès des meilleurs courts-métrages projetés toute la semaine.
Dans ce cadre, on peut attirer l’attention sur la « performance » accomplie par Denis Cartet et son équipe lors de la soirée d’ouverture du Festival, le lundi 29 novembre. En effet, avant la projection de son court-métrage, intitulé Mémoires vives, le réalisateur a produit devant le public et en direct, un « happening » original et hypnotique qu’il a nommé Mémoires digitales.
Il s’agissait d’un remix d’images et de sons de son propre film, mêlé de plans de ses comédiens filmés sur la scène installée dans la salle de projection. Deux caméramans se meuvent ainsi devant le public et enchaînent les gros plans des crânes lisses et des visages expressifs des trois comédiens, vêtus à l’identique, clones dupliqués des apparences dont les images mêlées renforcent la ressemblance voire la fusion, tant le film les rend indifférenciés et déshumanisés. En déployant toute une palette de gris accompagnée de ponctuelles fulgurances de violet, cette composition visuelle travaille sur le grain de peau, les traits du visage, les superpositions d’images, comme le rendrait le toucher d’un peintre.
À mi-chemin entre théâtre, cinéma, musique expérimentale et travail sur l’image numérique, ce moment de création pure, hybride, éphémère par définition, porte à réfléchir sur le processus même de composition et d’improvisation artistique qui se déroulait sous les yeux mêmes du public. Une véritable fascination émerge du parallèle symbolique créé par le réalisateur Denis Cartet, entre les images « réelles » projetées sur l’écran et les images mentales supposées que sont les souvenirs des personnages, souvenirs qui semblent se déverser directement dans le film, reliés par le fil invisible de la caméra.
Œuvre composite, Mémoires digitales renouvelle les frontières entre direct et différé tout en illustrant les liens entre souvenirs, imagination et réalité… Un moment de rêverie porté par une musique elle-même remixée en direct et en phase avec l’idée de recomposition permanente de l’œuvre.