Fruit de vingt-cinq jours de tournage dans la prison des Baumettes, à Marseille, Des hommes rend compte de certaines facettes de la prison rarement captées par les documentaristes et peu prises en charge par la fiction. Les journalistes Alice Odiot et Jean-Robert Viallet y montrent notamment les rapports des détenus avec différents aspects de l’administration. On voit ainsi la directrice de l’un des bâtiments parlementer avec un détenu qui dit s’être fait dérober ses « cantines » et finalement le dépanner d’un peu de tabac. On assiste également à des audiences plutôt expéditives : un détenu accusé d’avoir récupéré du cannabis lors d’un parloir passe en commission de discipline, un autre se doit de plaider pour l’aménagement de sa peine par visioconférence…
Loin d’une analyse wisemanienne des rouages du lieu, Des hommes hésite pourtant constamment sur le point de vue à adopter – une indécision qui contamine la forme du film, pleine d’effets vides de sens. Est-ce l’institution carcérale, dans l’incarnation particulièrement délabrée des Baumettes, qui intéresse les réalisateurs ? Ou bien les êtres humains qui l’habitent ? Si Alice Odiot et Jean-Robert Viallet dénoncent l’existence même des centres de détention en se faisant l’écho de la souffrance dont ils sont à l’origine, leurs personnages manquent d’épaisseur. Vingt-cinq jours n’étaient sans doute pas suffisants pour mettre à bas les masques et la théâtralité inhérente aux rencontres. Il semble qu’à trop vouloir gorger leur film d’éléments à charge contre l’établissement, les réalisateurs soient paradoxalement passés à côté de ce qu’il renferme de plus terrible – l’attente, l’ennui, le vide.