Sam Worthington paraît mal inspiré depuis Avatar. Bien que les apparitions de l’acteur fassent recette, ses choix artistiques sont peu pertinents. Dos au mur, mauvaise série B, dotée d’un discours binaire et d’un rythme léthargique, symbolise malheureusement ce constat. L’acteur se met maintenant au « cinéma fast-food », scénarisé, tourné et joué à la va-vite, un peu gras et difficile à digérer.
Pour son premier film de fiction, le Danois Asger Leth, qui a notamment travaillé avec Lars von Trier sur Five Obstructions, nous conte la fameuse histoire du héros accusé à tort, cherchant désespérément à prouver son innocence : Nick Cassidy (Sam Worthington), ancien policier condamné à la prison pour un vol qu’il n’a pas commis, réussit à s’évader ; il décide de médiatiser son drame en montant sur la corniche d’un hôtel new-yorkais où il menace de se suicider. Au bord du vide, il obtient l’aide d’une négociatrice, qui comprend progressivement que l’ex-flic détourne l’attention du public et de la police pour mettre en œuvre un plan destiné à le disculper. Dos au mur débute avec panache, grâce à une présentation efficace des personnages et des enjeux du récit. Quelques plans au style documentaire maîtrisé, nous plongeant dans un New York étouffant, ainsi qu’une évasion suivie d’une course poursuite automobile bien filmée – très lisible, ce qui est assez rare aujourd’hui –, laissent présager un excellent thriller. Mais patatras ! Au bout d’une demi-heure, le film connaît une chute de rythme fatale à l’instant même où Worthington enjambe la fenêtre de l’immeuble pour se confronter au vide. Le polar s’enfonce graduellement dans le grand n’importe quoi scénaristique, enchaînant avec brio toutes les maladresses possibles : un montage alterné raté alors que le métrage est entièrement fondé sur ce dispositif ; une relation rapidement insipide entre la négociatrice et Cassidy ; des protagonistes tous plus caricaturaux les uns que les autres.
À la vue de l’ensemble du film, on peut supposer qu’il a été réécrit plusieurs fois et que certaines projections tests ont dû causer bien des torts à sa cohérence. On doit subir une mécanique filmique très basique, fonctionnant sur la binarité bon citoyen/méchant homme d’affaire, avec un Ed Harris en salaud de service simpliste, cabotinant avec délectation dans son rôle de businessman dégueulasse. Si Dos au mur intègre des éléments de l’actualité récente, liés à la crise économique, notamment des références à Lehman Brothers et une petite diatribe sur la cupidité du milieu de la finance, il reste un pur action-movie qui use des bonnes vieilles recettes, un poil simplistes, des séries B des années 1980 et 1990 : après les différentes nationalités considérées comme suspicieuses par certains producteurs et scénaristes (les Russes patibulaires par exemple ou les Allemands néo-nazis), Hollywood tient un nouveau filon gagnant : le financier véreux. Malgré quelques réflexions sur la vulgarité de certains médias, qui scrutent comme des vautours les faits-divers tragiques, attendant le pire pour dévoiler un scoop au prochain journal télévisé, le film tape du poing dans le vide en se montrant tout aussi immoral qu’une chaine comme Fox News : Dos au mur veut capter l’attention du spectateur par tous les moyens, en l’abreuvant de rebondissements outranciers, d’un populisme désagréable et de formes ultra-généreuses : Genesis Rodriguez, qui joue la belle-sœur de Nick Cassidy, est la bimbo de service, tout droit sortie des années 1980, insipide mais dotée d’une solide poitrine renforcée par un push-up splendide et d’un fessier confortablement mis en valeur par une caméra en rut. Les mâles en ont pour leur argent. Entre quelques blagues homophobes traditionnelles, le thriller déroule tranquillement son discours sexiste, notamment par le personnage de la négociatrice (Elizabeth Banks), qui doit prouver qu’elle en a dans le pantalon face à un univers policier machiste. Les femmes n’ont que deux possibilités dans le modèle de société prôné ici : user de leurs corps ou se masculiniser.