Après la réalisation de deux documentaires télévisés sur le quotidien d’athlètes en 2003, Régis Wargnier porte cette fois-ci l’athlétisme sur grand écran et construit une fiction peu inspirée. Bien qu’il s’agisse de l’une de ses passions, le réalisateur ne parvient pas à en faire une matière cinématographique, si bien qu’on peine à trouver un point d’accroche pour aborder le film, dont le beau sujet se perd dans une platitude publicitaire assez peu alléchante.
Après un séjour en prison, Leïla rencontre Yannick, un jeune athlète non-voyant. Elle lui sert de guide et s’entraîne à ses côtés afin de préparer les prochaines compétitions. Dans un premier temps tenue secrète, l’incarcération passée de Leïla finit par surgir sur le tapis et mettre de l’huile sur le feu. Yannick est très déçu, il lui faisait « confiance » et elle lui a menti. Drame. Musique. Mais remontons un peu en arrière, lors de la rencontre des personnages qui donne lieu à une horrible scène à la cafète du stade, digne d’un mauvais feuilleton. Plan large. Leïla et Yannick sont plantés à chacune des extrémités du plan, tels deux Playmobils vissés au sol. Et… tiens ! Un figurant est également venu camper dans le cadre, attablé dans le fond. Ne cherchez pas plus loin. Vous êtes bien dans un sitcom AB sponsorisé par la Fédération Française Handisport. Entendons-nous bien. Rachida Brakni et Cyril Descours sont loin d’être de mauvais acteurs. Leur tâche est difficile et leurs efforts ne parviennent malheureusement pas à rattraper la lourdeur des dialogues.
Sinon, on apprend grâce l’athlétisme plein de belles choses sur la vie, qu’il faut toujours courir « l’un pour l’autre » et non « l’un avec l’autre ». Merci le sport ! Régis Wargnier n’est pas le premier à manier la métaphore sportive (la vie est une lutte etc.), Scorsese avait excellé dans cette entreprise, mais ne réalise pas Raging Bull qui veut. Le film passe totalement à côté du corps, l’un des plus beaux sujets qui soient, dont le réalisateur prend grand soin de ne pas exploiter la plasticité afin d’y plaquer plus facilement ses messages pesants de bons sentiments estampillés Décathlon. Notons tout de même une petite tentative de décomposition du mouvement muybridgienne dans un travelling latéral ralenti qui se démarque du reste, mais qui est rapidement avortée. Au passage, vive le placement de produit ! La Ligne droite est un véritable parc d’attractions pour Nike et Adidas qui ont dû s’en donner à cœur joie à coups de tee-shirts et de survêtements que l’on peut apprécier à chaque scène.
La Ligne droite n’est pas même un film qui satisfera les amateurs d’athlétisme, car bien trop occupé à promouvoir une idée du sport bien-pensante, ou comment faire passer un film institutionnel doublé d’un film publicitaire pour un long-métrage de cinéma. Le dernier film de Régis Wargnier est un peu l’enfant bâtard qu’aurait conçu Nike avec le Comité International Paralympique. Autant dire qu’il est inutile de se déplacer car on s’est là fort éloigné du cinéma.