Après s’être emparés du mythe du loup-garou dans Teddy, les frères Boukherma élargissent leur bestiaire sur un mode ouvertement référentiel. Leur nouveau long-métrage emprunte son titre au Jour du Dauphin de Mike Nichols et sa trame narrative à Jaws, le mètre étalon du film de requin. Il ne sera pourtant nullement question de se mesurer à l’original sur le terrain du spectaculaire. La mise en scène de l’effroi et l’anticipation perverse du carnage sont ici immédiatement désamorcées par des pointes de dérision qui rompent tout investissement du spectateur : d’un vacancier agressé, il ne reste sur la plage qu’un nez grotesque et l’aileron du requin censé signaler l’approche de l’animal est plutôt source de confusion…
Sans verser à proprement parler dans la parodie, les Boukherma font du principe du film catastrophe (où le spectacle réjouissant de la violence est inextricablement mêlé au désir d’un retour à l’ordre) un moteur comique. L’essentiel des séquences reposent ainsi sur un décalage entre l’obstination du personnage principal joué par Marina Foïs (une gardienne de la paix qui peine à rempiler à l’heure de la retraite) et son entourage, soucieux de conserver sa quiétude. Les excès de l’héroïne ne découlent eux-mêmes que de son zèle à persévérer dans sa fonction. Si ce jeu entre un principe d’inertie de la communauté et un dérèglement venu des profondeurs est matière à gags, la rencontre entre le grand spectacle et un certain cinéma populaire hexagonal (on pense à la série du Gendarme de St-Tropez) s’avère moins fructueuse. En traitant l’un et l’autre comme de simples imagiers (le requin carnassier vs. la brigade municipale et ses rites d’un autre temps), les Boukherma finissent par noyer le poisson.