Ce soir, évitez de vous faire sucer : avec ce slogan racé, le ton des Dents de la nuit est donné. Humour troupier et répétitif ; acteurs manifestement tous obnubilés par l’envie de tirer… la couverture (oui, pardon, je sais, mais c’est contagieux, voyez-vous) à eux ; mise en scène, sens du rythme, et originalité nuls… Les Dents de la nuit accumule les contre-performances avec une bonne santé édifiante, et en plus l’équipe a l’air contente.
Sam (Patrick Mille) est jeune, beau, sexy, fêtard invétéré. Il est l’ami de la jolie Alice (Frédérique Bel), qui se trouve opportunément (pour une caméra bien prompte à courir le long d’une cuisse, entre deux seins, ou bien sur un fessier accueillant – il faut bien appâter le chaland ma bonne dame, et puis c’est décalé, tu vois) être prof d’aérobic, et aussi fêtarde. Se joint à eux la superbe Prune (Julie Fournier), qui n’est pas prof d’aérobic, mais qui n’échappera pas non plus à une caméra putassière qui soulignera éhontément ses formes. Un jour, un mystérieux jeune homme aborde Alice (qui se trouve être malheureuse en amour) pour lui proposer une invitation pour la soirée VIP de chez VIP. Sam, ne s’en laissant pas compter, lui vole deux autres invitations, et voilà nos trois larrons partis pour ce qui promet d’être la fête de la décennie… Sauf que non : en fait, le vampirique Duc de Journiac (Tchéky Karyo, une serpillière sur la tête et un manteau taillé dans un tapis de seconde zone) a invité tous ses congénères, et les invités humains de la fiesta constituent le buffet. Fuyant à la fois devant les jeux d’acteurs pourris, les vampires assoiffés de sang et l’humour le plus mauvais, nos trois héros vont-ils s’en sortir, surtout une fois qu’ils auront été transformés en cochons d’Inde parlant le latin ?
Mystère. Des fois que vous soyez inoccupé(e)s, peut-être malgré tout voudrez-vous aller voir cette affligeante pantalonnade. Après tout, ça se comprend : s’il fait chaud, les salles de cinéma présentent cet avantage d’être généralement climatisées, donc… Mais aucune autre raison ne pourrait franchement inspirer à qui que ce soit le moindre intérêt pour cet étron filmique qu’est Les Dents de la nuit. Non seulement le scénario est nullissime, non seulement les acteurs sont faramineusement mauvais (un grand bravo à Hélène de Fougerolles, d’ailleurs, pour sa contre-performance. Rassurez-vous, elle meurt.), mais en plus l’humour tombe à plat d’une façon redoutable. Car nous sommes ici en présence, non d’un film de cinéma, mais d’un sketch à répétition. Pour preuve, les deux principaux ressorts comiques sont la précitée Hélène de Fougerolles – dont les débuts ont tout de même été Le Collège des cœurs brisés… –, Frédérique Bel en rupture de Minute blonde et Vincent Desagnat – de la bande à Michael Les 11 Commandements Youn. La recette est simple : on prend les mêmes, et on file sur le grand écran, et assaisonnant le tout d’une bonne louche de gags foirés sur tous les autres personnages…
Ô combien merveilleux, le moment où une vampire sort, un rot aux lèvres, d’une cabine de chiottes en disant « je suis pleine, j’en ai sucé quatre ce soir » ! Ô combien spirituel, la série de jeux sur les mots de Karyo et de sa serpillière (« je ne vais pas me faire de cheveux blancs… », « je ne vais pas couper les cheveux en quatre… » – mais SI, c’est drôle !) ! Ô combien novatrice la séquence où Frédérique Bel, prof de maillot sexy faisant de l’aérobic donc, lance son aïepode pour décoller des mandales en rythme dans le nez de deux vampires qui en veulent, étonnamment, plus à sa carotide qu’à ses formes – et là, que se passe-t-il ? Hop, problème : le jouet musical n’est plus chargé, au revoir potion magique. Que ceux qui ne l’ont pas vu venir lèvent la main et retournent se faire une cure de Stuart Gordon, Mel Brooks, Dan O’Bannon et Peter Jackson époque Bad Taste.
Les réalisateurs, les pubeux Stephen Cafiero et Vincent Lobelle se la pètent à mort, notant qu’avant eux, le cinéma français n’avait jamais vu de film de genre parodique, et surtout pas d’horreur et vampirique. On se retient de leur envoyer des copies de Cible émouvante, Hellphone ou Bloody Mallory, films où, à la différence de ce sombre navet, l’accent était avant tout mis sur l’amour du genre, et non sur des protagonistes vides et des gags télés (-phonés, -visés, etc…). L’humour péquenot des Dents de la nuit n’interpelle aucunement les connaissances et les références du spectateur, malgré les modestes influences proclamées des réalisateurs (Apocalypse Now, Un jour sans fin, Little Odessa et… Mary à tout prix !). Catalogue fade de gags vus 278 915 fois (à peu près), de mise en scène inexistante, et de stars de seconde zone formées à l’école de la télé beauf, Les Dents de la nuit ira très vite grossir les rangs des myriades de DVD vendus à 1€ les cinq sur le net, et c’est déjà trop cher payé.