Durant une belle nuit estivale, les ébats amoureux d’un jeune couple sont soudainement interrompus par le rugissement d’un animal sauvage. L’incertitude qui pèse sur cette manifestation auditive révèle d’emblée l’objet de la trame narrative, où un léopard est soupçonné de plusieurs disparitions dans la région. Menant sa propre enquête en parallèle de la police, Laura (incarnée par Lily-Rose Depp), une adolescente en vacances, va finir par se lier d’amitié avec Paul (Laurent Laffite), un étrange écrivain fantasque vivant quasiment en ermite. Par-delà l’aspect fantastique et insolite que la bête confère à ce récit, sa présence semble surtout matérialiser une quête beaucoup plus intime : l’éveil sexuel et amoureux adolescent.
Compromis entre visibilité et intériorité
L’ambition d’une exploration introspective est toutefois gâchée par une réalisation qui se concentre plutôt sur des choix de façade : lors d’une séquence, Laura s’interroge sur la manière dont on peut détecter le sentiment amoureux, ce à quoi on lui répond que « cela se voit sur un visage qui rayonne ». Le dialogue fait écho à une séquence antérieure dans une grotte où Laura, n’étant pas encore au fait de ses sentiments, est éclairée par une lumière bleuâtre lui conférant un teint blafard, telle une morte-vivante. Cet exemple parmi d’autres est assez symptomatique d’un film préférant révéler ses partis pris de mise en scène au lieu de cultiver une part de secret et d’impénétrable.
Les Fauves réussit pourtant à établir une filiation intéressante avec La Féline par l’expression d’un érotisme suggestif, ainsi que d’un mystère enfoui se révélant au détour de séquences ponctuelles : les scènes en forêt où se dessine un lien physique et affectif entre Paul et Laura (en particulier la séquence de l’arbre, dont nous tairons le détail pour ne pas dévoiler l’intrigue, évoquant une masturbation), ainsi que la présence de l’inspectrice Camus (Camille Cottin). Si l’apparition et le passé de l’enquêtrice sont assez grossièrement introduits – Camus a perdu son mari, apparemment attaqué par le léopard – sa cicatrice sous l’œil pointe la trace d’un passé refoulé venant redistribuer, à la fin du film, les cartes de la monstruosité (ou de l’animalité, puisque c’est ce dont il est question). Hélas, ces quelques bonnes idées sont définitivement gâchées par une conclusion maladroite, révélant toute la superficialité stylistique de la mise en scène : un monologue de Laura/Lily-Rose, (il s’agit en réalité d’un message vocal laissé à Paul) face camera, dispositif qui ressemble à une bande démo d’acteur – c’est-à-dire à un objet fonctionnel, à rebours des promesses que portaient le film.