Quatorze ans après Jin-Roh, Hiroyuki Okiura revient au grand écran : foin de la complexité et de l’ambition de son conte politico-militaire – Lettre à Momo est un film paisible, léger et tendre sur le deuil à hauteur d’enfant. Une mignonne petit histoire, qu’il est hélas trop facile d’oublier.
Momo et sa mère reviennent chez les parents de celle-ci, loin de la ville – on comprend rapidement que c’est pour retomber sur leurs pattes après le décès dans un accident de leur père et époux. Timide et réservée, Momo est également, sans qu’elle ose se l’avouer, écrasée de tristesse : tout cela ne facilite pas son intégration sur l’île où elle habite à présent, malgré la bonne volonté des enfants du coin. Tout change au moment où Momo devient consciente qu’un trio d’esprits familiers gloutons et grotesques habite leur maison – et qu’elle est la seule à les voir…
La Lettre à Momo se préoccupe assez peu d’ambiguïté : les esprits sont-ils bien là, où Momo les crée-t-elle pour concrétiser son besoin de faire son deuil ? Peu importe : l’idée est avant tout de décrire les aventures plus ou moins burlesques de la petite fille flanquée de son trio – péripéties plutôt attendues et sans beaucoup d’enjeu. Le seul moment de grâce vient de la lettre elle-même : message inachevé du père à sa fille, elle est la dernière chose qu’il ait écrite avant son accident – et, évidemment, après une dispute avec Momo. À la fois romanesque et pathétique, l’idée de cette lettre est le meilleur atout du film, même si celui-ci l’utilise finalement bien mal, le reste n’étant qu’une progression lente, tranquille et parfaitement convenue sur le chemin de l’acceptation de soi par la jeune Momo.
Lettre à Momo baigne ainsi dans une réelle candeur narrative, semblant cibler un public jeune et non encore encombré de références permettant de déceler le manque d’originalité du film. Par moment, le réalisateur va cependant se permettre quelques scènes étranges, plus originales et fantasmagoriques, la plus importante de ces scènes étant le climax du film, d’une formidable inconséquence. Mais nul ne semble en avoir cure : Lettre à Momo aligne une partition légère et sans conviction de péripéties candides sans vraiment d’ampleur pour approcher le thème, pourtant mature, du deuil – à ce stade, comparer Lettre à Momo avec les formidables Enfants-Loups permet d’en discerner tout le simplisme un tantinet mièvre.
Peu concerné par son script, Hiroyuki Okiura abat une besogne de faiseur consciencieux. On est aussi peu que lui intéressé par cette Lettre à Momo dont on suit le déroulement sans beaucoup d’émotions, quelles qu’elles soient. Pimentant son scénario prévisible de créatures spirituelles baroques, le réalisateur néglige pourtant leur potentiel délirant, excepté pour une scène formidable, qui constitue le meilleur moment du film. Balisé et attendu, Lettre à Momo se suit sans déplaisir ni surprise – tant qu’on n’a pas la mauvaise idée de se remémorer les promesses extraordinaires formulées par le désormais bien lointain Jin-Roh.