Dans sa version originale, Palma Real Motel avait le bon sens d’annoncer les heures mortes à venir (Las Horas Muertas est le titre original de ce second long-métrage mexicain, sous-titré d’ailleurs à l’écran « les heures creuses »). Il n’est d’abord question que d’ennui dans ce film qui voit Sebastián, jeune homme d’à peine dix-huit ans, s’occuper du motel de son oncle Gerry le temps que celui-ci subisse une intervention médicale – pour une durée indéterminée donc… Le motel a ceci de particulier qu’il s’agit d’un motel de passe : les amants venus profiter de quelques d’heures d’intimité – loin d’être creuses ou mortes, pour eux – garent leur véhicule dans un des emplacements – à chacun correspond une chambre. Sebastián arrive avec la clé – et devra faire le ménage à leur départ.
Pour venir en aide à son oncle, le jeune Sebastián se retrouve presque malgré lui avec les rênes du motel entre les mains. Très vite, c’est l’ennui qui le gagne – car entre les différents passages des clients, il y a peu de choses à faire, sinon nettoyer les chambres ou retaper le vieux motel au look à la hauteur de sa réputation. C’est sans compter sur la présence de la belle Miranda, maîtresse délaissée qui attend sous le porche son amant – qui souvent ne vient pas… Peu à peu une relation amicale se crée entre les deux personnages, tirant tout doucement Palma Real Motel de l’ennui qu’il donne à voir.
Creuser les heures
Un motel de passe, donc, dans lequel il ne se passe rien. Un film sur l’ennui, en somme, qui joue à plein sur la création d’une ambiance, sur les lentes présentations et analyses des sentiments des protagonistes. La relation qui se tisse peu à peu entre Miranda et Sebastián véhicule assez bien cette attention accrue pour les secrets et sentiments de chacun – auxquels, de sa position privilégiée, Sebastián finit par s’intéresser, poussé par Miranda. Premier remède à l’ennui : les commérages. Le tableau du lieu, porté par les paysages de Veracruz, est baigné d’une sérieuse mélancolie. L’ennui n’en est pas le seul matériau : le motif symbolique du motel, où se croisent jeunes amants (sans autre endroit où aller, on le devine) ou amours adultères est particulièrement propice à cette représentation, cristallisée avec le personnage de Miranda.
Là où le film s’égare, c’est dans la mesure où il ne parvient pas vraiment à dépasser ce creux qu’il donne à voir et à sentir. L’anecdote (la vie sentimentale de Miranda, maîtresse délaissée qui se console comme elle peut de sa situation ; le quotidien de Sebastián dans ce motel où il s’installe) trouve peu de possibilités pour se développer. Les deux personnages, donc, se rencontrent, jusqu’à tisser des liens de plus en plus serrés, de plus en plus chaleureux… Deuxième remède à l’ennui.
Malgré une sensibilité et une sensualité appréciables dans sa représentation presque picturale du lieu, mais surtout dans son débordement symbolique (le motif du motel de passe, subtilement décortiqué, souvent avec humour, comme un condensé des relations humaines et surtout de leurs hypocrisies), Palma Real Motel parvient peu à dépasser le strict cadre de son ambiance. Choisissant de s’intéresser à ses deux personnages à proportion égale, Aarón Fernández ne tranche pas, regarde la vie se jouer devant sa caméra, sans en tirer de véritable caractérisation – du monde, ou de quoi que ce soit. Le film est peut-être à l’image de Miranda, qui confie à son jeune ami qu’elle laisse la jalousie et les problèmes aux autres, pour ne profiter que de la tendresse et des bons côtés d’une relation. C’est dommage, car la matière de base est là. Mais c’est un bon début.