Homme de mots (romancier, essayiste, poète, dramaturge, scénariste, auteur de pièces radiophoniques, etc.), Georges Perec fut aussi homme d’images. On avait pu (re)découvrir en avril 2007 Les Lieux d’une fugue (1976), Récits d’Ellis Island. Histoire d’errance et d’espoir (1979) que Georges Perec et ses collaborateurs tournèrent pour la télévision et édités par l’INA. En décembre de la même année, c’est Un homme qui dort (prix Jean Vigo 1974), que La Vie Est Belle remet en lumière. Assorti d’un livret reproduisant le texte original adapté du roman éponyme et de précieux suppléments, cette édition constitue un événement majeur dans la perpétuation de la mémoire d’un auteur d’exception.
« I would prefer not to. » Le leitmotiv de Bartleby pourrait aussi être celui du personnage sans nom, de l’individu de 25 ans rompant un matin, sans raison apparente, avec sa vie d’étudiant lambda du début des années 1960, interprété par Jacques Spiesser dans Un homme qui dort. Et le roman de Perec, comme il l’a lui-même suggéré, pourrait être une manière de réécriture de Bartleby the Scrivener d’Herman Melville. Même expression d’une réticence face au possible, même retrait, même renoncement ; même refuge dans une indifférence qui dans le cas d’Un homme qui dort n’est pas à proprement parler une mélancolie (ici, nulle trace de romantisme : plutôt celle d’un sociologisme dans l’air du temps), mais une neutralité. Mais là où Bartleby se laisse mourir de faim, l’homme qui dort, au-dessus duquel planent les spectres de la folie et du suicide (« Tu n’es pas mort. Tu n’es pas devenu fou », entend-t-on dans la séquence finale) connaît un jour ce que le spectateur le plus optimiste reconnaîtra comme une forme de rédemption ; non pas une renaissance spectaculaire, mais la réconciliation discrète, sans effusion, ouverte mais toutefois non exempte d’inquiétude avec le cours des choses : « Non. Tu n’es plus le maître anonyme du monde, celui sur qui l’histoire n’avait pas de prise, celui qui ne sentait pas la pluie tomber, qui ne voyait plus la nuit venir. Tu n’es plus l’inaccessible, le limpide, le transparent. Tu as peur. Tu attends. Tu attends, place Clichy, que la pluie cesse de tomber. »
Entre l’œuvre de « nouveau romancier » que sont Les Choses (bien que Perec ait réfuté cette filiation : mais comment ne pas voir dans Les Choses un parangon de l’attention renouvelée à l’environnement matériel de l’homme contemporain dont parle Robbe-Grillet)? et les gageures formelles oulipiennes à venir (la structure délirante de La Vie mode d’emploi, l’exploit lipogrammatique de La Disparition), Un homme qui dort (1967) s’inscrit comme un livre transitionnel, dont la seule contrainte formelle (cependant, nous y reviendrons, déterminante) est l’emploi de la deuxième personne du singulier : « Pour qu’advienne le « je » de W [ou le souvenir d’enfance], il fallait en découdre avec ce « tu », prisonnier de la chambre de bonne, avec ce double qui dort dans une bulle blanche. Et d’avoir écrit la mise hors jeu va permettre le temps des jeux », écrit Claude Burgelin. Dans cette sorte de dialogue unilatéral entre un narrateur omniscient et un personnage muet, d’évitement du « je », se fait bien entendu jour l’indice autobiographique ; là encore les propres mots de l’auteur, pour qui toute littérature était par nature autobiographique, viennent le confirmer. Mais Un homme qui dort n’existe pas qu’en tant que livre. Il a son double cinématographique. En 1973, Georges Perec et Bernard Queysanne s’attèlent à son adaptation pour l’écran, sans argent mais forts d’un texte remarquable dont les quelques remaniements, outre la suppression des quelques scènes hypnagogiques d’endormissement, du séjour du personnage chez ses parents dans un coin de campagne anonyme, éloignent plus encore qu’à l’origine de toute forme de psychologisme, aplani à l’envi l’image du personnage, finalement élude les passages par trop citationnels, qui inscrivent le roman dans une histoire de la littérature. Tout dans la forme, jusque dans le noir et blanc moyen, ni élégant ni charbonneux, doit concourir à faire du jeune homme dont le film raconte la non-histoire une forme vide propre à toutes les projections —et c’est une fonction du « tu » que d’impliquer le spectateur dans le récit d’un non-destin, de l’enjoindre à l’empathie envers un homme entré dans une parenthèse existentielle.
Le cinéma sonore, contrairement à l’écrit, repose sur l’audio-vision, et permet toutes les variations entre bande-image et bande-son, ici tantôt discrépantes, tantôt confluentes. Le trait formel le plus important du film est la présence, parmi les éléments d’une bande-son complexe (sons post-synchronisés, bruitages, composition électroacoustique de l’ensemble 010 composé de Philippe Drogoz et Eugénie Kuffler), d’une voix-off, celle de Ludmila Mikaël, ou de ce qui réuni toutes les caractéristiques de cette « voix-je » dont Michel Chion nous dit qu’« elle parle depuis un point où le temps s’est pour un temps suspendu ». Comment définir la nature du rapport entre l’auteur (étymologiquement, cette voix en est la métaphore), cet être qui vit à l’écran et une voix qui, sans être intra-diégétique, approche au plus près la diégèse par l’emploi du « tu », présence forte, quasi-protagoniste du film ? Peut-être peut-on risquer, pour ce faire, une comparaison avec un film antérieur d’une dizaine d’années, mais présentant une similitude dans l’économie image/voix : La Jetée de Chris Marker (1962). Peut-être peut-on partir des interrogations de Jean-Louis Schefer à son sujet : « À quoi attribuer la voix continue qui double les images ? L’aventure est racontée par qui ? Un témoin, une essence dépersonnalisée du héros ? Un expérimentateur ? Ou celui-là qui a le savoir entier du temps, de la mort, des paradoxes de la mémoire ? […] celui qui parle dans le film, n’est pas l’auteur du film mais l’auteur du roman que le film brûle, esquisse, jette, économise et dont il retourne, si l’on peut dire, toute la substance. » Est-ce à dire que la voix-off est l’auteur ? Ou que toute voix-off (ou « voix-je ») est un personnage dont l’instanciation demeure jusqu’à la fin suspendue ? Dans le cas d’Un homme qui dort, nous nous situerions au point exactement central de la distance qui sépare l’auteur de son personnage, de part une portée autobiographique que nous avons déjà évoquée. Dans ce cas, cette voix pourrait participer du monologue intérieur si les auteurs du film n’avaient choisi une voix de femme, celle de Ludmila Mikaël. De ce fait même, la voix ne peut être « essence dépersonnalisée du héros » mais voix incarnée, vivante ; cette voix, en plus d’une histoire, convoie de par sa nature propre un sous-texte gender, et on ne peut faire l’économie de considérations sur la distinction sexuelle et la sexualité même : l’homme qui dort n’est pas neutre jusque dans sa nature désirante et libidinale, comme cela est brièvement évoqué : « Tu remontes dans ta chambre, tu te déshabilles, tu te glisses dans les draps, tu éteins la lumière, tu fermes les yeux. C’est l’heure où des femmes trop vite dévêtues se pressent autour de toi… » Ailleurs, c’est la suggestion de l’acte sexuel sublimé dans des parties de flipper d’un homo ludens sans joie : « Tu te colles contre les appareils, pendant des heures, pendant des nuits, rageusement, fiévreusement. Tu ahanes, plaqué sur la machine accompagnant de grands coups de rein les rebonds de la bille d’acier. […] Femmes peintes dont l’œil s’allume, dont l’éventail s’abaisse. Tu ne peux lutter contre un tilt. […] Tu ne peux engager de dialogue, tu ne peux lui faire dire ce qu’il ne saurait te dire. Tu as beau te serrer contre lui, haleter contre lui, le tilt reste insensible à l’amitié que tu éprouves, à l’amour que tu recherches, au désir qui te déchire… » Aveux d’impuissance à mots couverts, de misère sexuelle à l’époque de l’amour libre ? La voix, que Perec et Queysanne ont voulu la plus neutre possible dans ses effets, n’est en aucun cas sexualisée mais pas pour autant asexuée ; figure de l’altérité et tout à la fois présence maternelle, sororale, qui dans un même mouvement accompagne l’homme sans commisération et le domine subrepticement. La première séquence, matricielle et pendant laquelle la voix ne se fait pas encore entendre, présente l’hypothèse de ce qui aurait pu se passer, de ce qui aurait été le cours normal des choses : le personnage se lève, sort, se rend à la salle d’examen… C’est au moment où l’étudiant en sociologie, consciencieux, filmé en plan serré, affilié à l’habitus universitaire, lève les yeux de sa copie que s’opère la rupture, que le film glisse de ce niveau de réalité putative à ce qui constituera la vérité du film : la déprise, la dérive. « Ton réveil sonne, tu ne bouges absolument pas, tu restes dans ton lit, tu refermes les yeux. […] Un autre, un sosie, un double fantomatique et méticuleux fait, peut-être, les gestes que tu ne fais plus… » À partir de ce moment commence pour notre personnage une vie insulaire (« Ta chambre est la plus belle des îles désertes, et Paris est un désert que nul n’a jamais traversé »), un découplage entre une histoire individuelle, un devenir qu’il n’assume plus (contre-type de la description que donne Henri Lefebvre de l’être historique dans La Fin de l’histoire (1970)) et histoire sociale, et même universelle : « Quelque chose qui t’a jusqu’alors réconforté, t’a tenu chaud au cœur, le sentiment de ton existence, l’impression d’adhérer, de baigner dans le monde, se met à te faire défaut… » Puis la voix poursuit : « Ton passé, ton présent, ton avenir se confondent » : « amnésique au pays des aveugles », « dur noyau d’indifférence », l’homme qui dort, plus encore que de rompre avec le socius, s’affranchit de toute existence temporelle, s’abstrait de l’histoire et suspend son histoire propre : « Comme si, sous ton histoire tranquille et rassurante d’enfant sage, de bon élève, sous ces signes évidents, trop évidents, de la croissance – les traits au crayon sur le chambranle de la porte des cabinets, les diplômes, les pantalons longs, les premières cigarettes, le feu du rasoir, l’alcool, la clé sous le paillasson pour les sorties du samedi soir, le dépucelage, le baptême de l’air, le baptême du feu – avait depuis toujours couru un autre fil, toujours présent, toujours tenu lointain, qui tisse maintenant la toile familière de ta vie retrouvée, le décor vide de ta vie désertée, images en filigrane de cette vérité dévoilée, de cette démission si longtemps suspendue, de cet appel au calme… »… Peut-être l’homme qui dort représente-t-il dans sa singularité l’homme moderne quintessentiel, peut-être réalise-t-il l’inclination primordiale de ce dernier à fuir sa propre historicité : Henri Lefebvre en a prit acte dans sa Critique de la vie quotidienne, tout en nous apprenant qu’on échappe pas à l’histoire, sentence dont l’homme qui dort est la preuve emblématique : « Consolidée autour de ce noyau, la vie privée, la quotidienneté sert d’alibi pour échapper à l’histoire, aux échecs, aux aléas, aux menaces. Ce qui creuse l’abîme entre le “vécu” et l’historique, abîme qui provient des échecs et des reflux de l’histoire. Mais ne nous y trompons pas. La réticence devant l’histoire, la fuite devant l’historique et les problèmes de la société globale (c’est à dire la politique), c’est encore une façon de vivre l’histoire. L’extra-historicité de la vie quotidienne moderne est encore une modalité de l’histoire et une manifestation de ses conflits internes. La quotidienneté en se consolidant comme « vie privée » n’abolit pas pour autant l’histoire, pas plus que le déterminé n’abolit l’aléatoire qui s’y mêle. » Et on ne peut s’empêcher de penser, dans un effort de contextualisation de l’œuvre, aux évènements de mai 1968, manifestation d’une aspiration collective à la réappropriation de la vie quotidienne ; il n’est à ce titre pas indifférent que notre personnage soit étudiant, a fortiori en sociologie : « La mise en spectacle de la réification sous le capitalisme moderne impose à chacun un rôle dans la passivité généralisée. L’étudiant n‘échappe pas à cette loi », écrivent les étudiants UNEF de Strasbourg sous influence situationniste dans le fameux pamphlet De la misère en milieu étudiant considérée sous ses aspects économiques, politiques, psychologique et notamment intellectuelle et de quelques moyens pour y remédier (1967). Mais l’homme qui dort est « être sans désir, sans dépit, sans révolte [je souligne] »… Il s’est soustrait à cette instant history dont il ne perçoit que l’écho lointain pour l’oublier aussitôt : « Tu t’assieds au fond d’un café, tu lis le Monde ligne à ligne, systématiquement. C’est un excellent exercice. Cinq cent ou mille informations sont passées devant tes yeux attentifs. Mais ta mémoire a pris soin de n’en retenir aucune […]. Tu peux encore t’étonner que la combinaison, selon des règles finalement très simples, d’une trentaine de signes typographiques soit capable de créer, chaque jour, ces milliers de messages. » À l’heure du structuralisme, Perec imagine un être hors structure, désapprenant le langage (« l’indifférence dissout le langage, brouille les signes ») et se défiant de tout système signitif lié à l’image sociale de l’individu (Roland Barthes, Système de la mode (1967); Jean Baudrillard, Le Système des objets, (1968)) : « Manger, dormir, t’habiller, que ce soit simplement des actions, des gestes, des évidences, mais pas des preuves, pas des monnaies d’échange : ton habillement, ta nourriture, tes lectures ne parlerons plus à ta place. Tu ne leur confieras plus l’épuisante, l’impossible tâche de te représenter. » À la fin du film, la voix révèle le caractère vain de ce qui est en fait une quête identitaire, voire essentialiste, la tentative de combler un déficit de filiation : « Tu ne pars pas, pour la millionième fois, rechercher la réalité de l’expérience ni façonner dans la forge de ton âme la conscience incréée de ta race. Nul antique ancêtre, nul antique artisan ne t’assistera aujourd’hui ni jamais. »
Cette existence au bord de l’anomie entre formellement en résonance avec les cours distincts que suivent image et texte dit, qui ne se rejoignent que ponctuellement ; le jeu de synchronisme/disynchronisme, le différentiel de temps et de lieu d’abolir toute détermination d’espace et de durée. Dans ce brouillage de l’espace et du temps diégetiques deux catégories d’images d’échelles variées (du plan général sur Paris qui ouvre le film aux inserts sur l’œil de Jacques Spiesser, dont le visage impassible est omniprésent) se distinguent pourtant : les plans où apparaissent l’acteur, dans sa chambre de bonne ou dans la rue, et les vues de son environnement, motif de papier peint ou micro-scènes de l’infra-ordinaire urbain. Tel l’homme des foules de Poe, l’homme qui dort parcourt la ville sans but. À l’indifférence au temps, scandé sur la bande-son par le tic-tac d’une pendule, par la goutte du robinet du poste d’eau sur le palier, par le clocher de Saint-Roch, correspond une indifférence à la ville, éprouvée sur le mode de l’errance, de la dérive, de l’égarement, de la contrainte plutôt que du jeu (« tu inventes des périples compliqués, hérissés d’interdits qui t’obligent à de longs détours ») : « Tous les instants se valent, tous les espaces se ressemblent… » À plusieurs reprises apparaissent des plans serrés sur des caméras de vidéosurveillance (où l’on apprend au passage que le phénomène n’est pas tout à fait nouveau) : c’est l’indice du « processus par lequel l’agencement d’un espace implique en retour une politique du corps, c’est à dire une distribution contrôlées des conduites individuelles et collectives », auquel l’homme qui dort tend à échapper. Cependant, si la comparaison est tentante, nous ne sommes pas là du côté de la dérive psychogéographique situationniste, comportement dont Guy-Ernest Debord a affirmé le caractère « ludique-constructif ». La chambre, la ville : enchâssement d’espaces clos, sans issue (« tu dors, tu manges, tu marches, tu continues à vivre, comme un rat de laboratoire qu’un chercheur insouciant aurait oublié dans son labyrinthe ») : l’ « ailleurs » ne se manifeste que par images interposées. C’est, dans la chambre, une affiche d’agence de voyage, le mot « Tunisie » barrant un paysage stéréotypé. C’est le refuge dans les cinémas de quartier, où l’homme qui dort se fait spectateur de films que l’on devine sans qualité. C’est la visite de galeries d’art, ou s’opère une indistinction entre réel et représentation, ou peut-être un basculement du réel dans la seule surface de la représentation : alors qu’à l’image alternent des travellings avant sur le regard de Spiesser assis sur un banc et sur la surface rugueuse de l’arbre qui lui fait face, où a été gravé un cœur, la voix dit : « Tu apprends à regarder les tableaux comme s’ils étaient des bouts de mur, et les murs, comme s’ils étaient des toiles dont tu suis sans fatigue les milliers de chemins, labyrinthes inexorables, texte que nul ne sait déchiffrer, visages en décomposition. » Mais à un moment l’indifférence, l’apathie de l’homme qui dort mue en inquiétude, en malheur : « Le malheur n’a pas fondu sur toi, il s’est insinué presque suavement. […] Le piège, c’était ce sentiment parfois presque exaltant, cet orgueil, cette sorte d’ivresse […]. Le piège : cette illusion dangereuse d’être infranchissable, de n’offrir aucune prise au monde, de glisser, intouchable, yeux ouverts regardant devant eux, percevant tout, ne retenant rien. Homme sans mémoire, sans frayeur… » A ce moment la voix se fait judicatoire. Et la foule, jusqu’alors fantôme, s’insinue dans le vécu de l’homme qui dort : d’abord les individus en rupture de ban, « bannis, parias, exclus ». Puis une énumération de types qui inclus le tout venant de la société, de ce que Perec nomme les « monstres » (« les monstres sont entrés dans ta vie, les rats, tes semblables, tes frères ») : « Les monstres avec leur famille nombreuse, avec leurs enfants monstres, leurs chiens monstres ; les milliers de monstres bloqués par les feux rouges ; les femelles glapissantes de monstres ; les monstres à moustache, à gilet, à bretelles, les monstres touristes déversés par paquet devant les monuments hideux, les monstres endimanchés, la foule monstrueuse… » À l’image, des vues rapprochées d’une foule serrées, en courte focale et au contraste accentué : la caméra, jusqu’alors entité autonome et ubiquitaire, se fait subjective. Apparaît alors le fantasme d’une eschatologie collective, d’une dissolution de la totalité dans une fin du monde : « […] Tu attends que tout s’arrête, la pluie, les heures, le flot des voitures, la vie, les hommes, le monde, que tout s’écroule, les murailles, les planchers et les plafonds. » Puis vient le temps du retour, que la musique de l’ensemble 010 vient emphatiser ; la voix serait alors celle d’un ange gardien montrant à l’homme qui dort le chemin de la survie (comme l’écrit Claude Burgelin, ici le « tu » « […] indique un regard extérieur qui objective ou dicte les conduites [je souligne] » : « Le monde n’a pas bougé et tu n’as pas changé. L’indifférence ne t’a pas rendu différent. […] Le temps qui connaît la réponse a continué de couler. C’est un jour comme celui-ci, un peu plus tard, un peu plus tôt, que tout recommence, que tout commence, que tout continue. » Je ne règlerais pas la question de savoir ce que l’homme a à nous dire aujourd’hui, mais très certainement a‑t-il beaucoup à nous apprendre sur notre époque, « messager porteur d’une lettre sans adresse… »