Parallèlement au Festival, les Trois Continents ont mis en place un atelier de formation à la coproduction internationale destiné à de jeunes réalisateurs et producteurs des pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine. Son coordinateur, Guillaume Mainguet, nous a parlé de son histoire, son rôle, son fonctionnement.
« Produire au sud » est né il y a dix ans, dans la mouvance d’une dynamique mondiale où des plate-formes de coproduction se sont créées dans plusieurs festivals (Locarno, Cannes avec la Cinéfondation, Paris Cinéma avec Paris Project, Rotterdam, Berlin, Bafici à Buenos Aires…). L’idée, enrichir le repérage des films finis d’une découverte de projets au stade du scénario, mettre en relation des porteurs de projets du Sud et des co-producteurs potentiels. « Produire au sud » a notamment soutenu les premiers films d’Apichatpong Weerasethakul, Ursula Meier, Pablo Fendrik, Pablo Stoll et Juan Pablo Rebella.
L’atelier nantais a pour spécificité de proposer une formation servant aux producteurs du Sud à s’y repérer dans les méandres des fonds internationaux existants. Après avoir dû s’interrompre l’an dernier pour des problèmes budgétaires, l’atelier a réduit le nombre de projets sélectionnés (parmi une centaine de candidatures). Ils étaient six cette année : Argentine, Brésil, Ghana, Ouganda/Afrique du Sud, Ouzbékistan et Philippines. Pendant la semaine du festival, producteurs et auteurs, tous très jeunes, rencontrent des spécialistes en co-production internationale (producteurs, consultants en scénario, distributeurs, vendeurs internationaux…) qui étudient les projets en détails pour adapter leur enseignement aux besoins de chacun (éventuelle nécessité de réécrire le scénario, entraînement au pitching…). Les participants présentent aussi leurs projets (dont le budget doit être compris entre 300 000 et 700 000 euros) au public. Sur les neuf scénarios, quatre probablement aboutiront, en raison de la force de leur sujet, de la spécificité du pays d’où ils proviennent, susceptible de créer un intérêt particulier. Mais si bon nombre de projets finissent par avorter (20 à 30 % sortent en salles), le passage par l’atelier permet aux producteurs et aux auteurs de rentrer chez eux forts de connaissances qui les rendront plus performants pour de prochains films. Lorsque la productrice ouzbek explique que son entreprise est la première dans son pays à expérimenter la co-production internationale, on comprend bien l’opportunité que représente l’atelier nantais pour sa formation.
Guillaume Mainguet explique que cette année, les propositions africaines étaient plus importantes que les autres (un tiers des projets reçus), que comme à chaque fois l’Amérique du Sud était très présente (y compris pour les petits pays tels que le Paraguay, le Pérou, la Bolivie), ce qui n’est jamais vraiment le cas de pays tels que la Malaisie, les Philippines, la Chine, l’Inde. En terme de contenu des scénarios, les thèmes du territoire, de la frontière, de la porosité entre fiction et documentaire semblent avoir laissé place au charnel, à la sexualité. L’émergence de la production télévisuelle aurait au Sud les mêmes effets regrettables que ceux que nous connaissons bien, le formatage des sujets et des formes.
« Produire au sud » coordonne aussi des ateliers internationaux (Bafici à Buenos Aires, festivals de Bangkok, Beyrouth, et en projet Bel Orizzonte au Brésil, Durban en Afrique du Sud, Valvillia au Chili…), en collaboration avec des acteurs locaux à même d’aiguiller les producteurs sur le terrain. Pour ce qui est des dynamiques respectives de ces pays du Sud, on note une abondance de création en Amérique latine (notamment au Brésil et en Argentine) et en Chine, une stabilisation en Asie, une difficulté à s’ouvrir à l’international pour le Maghreb, l’Asie centrale et le Moyen-Orient.