Succès public au Japon, Brave Story est le nouveau long métrage du studio Gonzo, déjà aux commandes d’Origine. Subtilement différent de son prédécesseur, Brave Story apparaît comme plus fin, à la fois visuellement et scénaristiquement – à tel point qu’on se prend à regretter que le film ait dû sacrifier aux exigences de durée le développement d’un monde plutôt prometteur.
Wataru, jeune collégien, voit sa vie partir en lambeaux. Alors qu’il n’avait rien vu venir, il assiste dans la même journée au départ de son père de la maison familiale, et l’admission à l’hôpital de sa mère, dans un état grave. Sa découverte, quelques heures auparavant, d’un portail vers un autre monde dans lequel, pour le prix d’une quête réussie, le jeune garçon pourrait voir exaucés tous ses vœux, prend alors tout son sens à ses yeux, et il décide de tenter sa chance dans ce monde inconnu.
Le récit de la quête initiatique, forme narrative extrêmement codifiée, est au Japon un passage obligé. Le pays du soleil levant voit ainsi proposé à son public adolescent (pas seulement adolescent, d’ailleurs) un nombre impressionnant de récits similaires, largement plus répandus et mieux distribués qu’ils ne le sont en Occident – que ce soit par les livres, films, mais aussi et surtout par les jeux vidéo de rôle à la Final Fantasy et les séries animées et mangas, dont la distribution dans nos contrées n’est qu’une ombre falote, par rapport aux centaines de titres proposés au Japon. Brave Story, succès public dans son pays d’origine, appartient à cette catégorie très familière aux Nippons – mais assez peu connues du public français. C’est donc avec un œil neuf que celui-ci verra cette nouvelle production Gonzo, qui a le mérite de proposer par le menu toutes les constantes narratives : épreuves formatrices, rencontres plus ou moins amicales (jusqu’à celle de son indispensable alter ego-ennemi juré), accomplissements divers sur la voie du passage à l’âge adulte…
Le film suit une ligne directrice dont la forme est connue, avec parfois une application à vouloir rendre avec exactitude les pérégrinations survenant dans le best-seller éponyme de Miyuki Miyabe – ce qui finalement, constitue le principal défaut du film. Les rencontres et épreuves sont traitées d’une façon malheureusement linéaire, et sans prendre véritablement le temps de développer intrigues et personnalités. Brave Story tombe dans le piège de l’adaptation asservie à son matériau d’origine, par peur probable d’un jugement désapprobateur des fans de l’œuvre. On sait pourtant combien brillante peut être une adaptation qui sait s’éloigner de son œuvre originale : les adaptations éclatantes de Nausicaä de la vallée du Vent et d’Akira en sont les preuves.
Qu’à cela ne tienne : Brave Story, pour naïf qu’il soit, possède de belles qualités. Le style graphique du studio Gonzo s’est affiné, au point de ne pas avoir à tout miser sur la perfection glacée et impersonnelle d’un Origine, pour revenir à un trait simple mais soigné, mais qui permet surtout de donner à ses protagonistes une véritable identité, que pourrait leur nier le récit parfois trop superficiel. C’est le sentiment qui domine, au sortir de Brave Story : on eût aimé un récit plus long, l’opportunité d’en apprendre plus sur les uns et les autres, tant il est vrai que les personnages apparaissent soignés. Il est commun de voir sortir au Japon les déclinaisons en long-métrage des séries à succès : croisons les doigts pour que le chemin inverse soit accompli pour Brave Story.