Après un premier long pas très convaincant (Ted), l’un des enfants terribles de la télévision américaine, Seth MacFarlane, créateur de la série d’animation Les Griffin, revient avec un projet plus ambitieux. Albert à l’Ouest cherche en effet, tout en reproduisant les codes du genre, à pervertir le matériau originel du western, en un parti-pris qui servirait presque d’argument de vente (ce que le titre original du film, A Million Ways to Die in the West, ne manque pas de souligner) : le Far West est le lieu de tous les dangers, qui s’abattent de façon arbitraire sur ses habitants. Un programme qui vire finalement plus au gimmick qu’à une réelle relecture comique du western, tant le procédé – même s’il est parfois drôle, trash et souvent cruel – semble détaché du reste de la diégèse.
Car le film puise en vérité son inspiration du côté de la comédie américaine des années 2000, en une tentative sporadique de jouer avec les codes de la modernité sous forme de clins d’œil tirés par les cheveux (un enfant qui joue au cerceau est lointainement assimilé à un geek devant sa tablette tactile), tout en restant du côté d’une romance vaguement niaise et courue d’avance, ainsi que du récit d’apprentissage de circonstance (un éleveur de moutons poltron va apprendre les vertus du courage…). Bien décidé à réaliser le grand écart entre comédie familiale du dimanche soir et saillies régressives, MacFarlane se prend les pieds dans le tapis d’un récit stéréotypé qui ne convainc ni par sa volonté rassembleuse, ni par son inspiration effrontée, et d’une mise en scène à cheval entre « grande forme » et reconstitution appliquée. Mais il ne suffit pas de filmer les grands espaces américains pour insuffler de l’ampleur au film, tout comme la reproduction fidèle d’une petite ville du Far West n’est en aucun cas gage d’immersion.
Petit calibre
MacFarlane est en vérité le produit calibré de tout un pan de la comédie américaine de ces dernières années, aux vertus à la fois prétendument humanistes et parangon de la bonne morale, qu’il pense faire passer avec une dose de pseudo subversion. Mais le fond de l’affaire reste toujours le même : ici, ce sont de grands garçons qui jouent aux cow-boys pour plaire aux filles, lesquelles sont, comme d’habitude, reléguées au rang d’utilité narrative (le « gros lot » à remporter). Schéma d’une mesquinerie sans nom, tant ce type de comédies érige le mot « subversion » – vague étalage d’une inclinaison trash et obscurément belliqueuse – en caution de valeurs progressistes. Comme si le « ricanement méchant et sale », degré le plus bas de l’échelle du rire, servait de blanc-seing à une guimauve des plus traditionalistes. Il est grand temps de se tourner vers autre chose.