Sorti dans son pays d’origine début 2010, Boy, film néo-zélandais de Taika Waititi, a fait la tournée des festivals avant d’arriver sur nos écrans. Pétrie de la culture pop des années 1980 (E.T. et Michael Jackson en tête), l’histoire prend place dans un petit village où une fratrie maorie voit son quotidien chamboulé par le retour d’Alamein, le père des protagonistes tout juste sorti de prison. Boy et son scénariste, réalisateur et acteur principal développent une intrigue convenue recouverte du vernis de la fantaisie et de la compassion imposée.
Distribué en France par Les Films du Préau comme un film pour enfants, Boy a d’abord été exploité dans son pays d’origine, la Nouvelle-Zélande, où il a conquis un public de tous âges (il a rapporté plus de six millions de dollars au box office). Comme la plupart des phénomènes de ce type, Boy réunit tous les ingrédients du feel good movie, qu’il étrenne à la manière de labels identifiables. Excentricité et loufoquerie, bons sentiments et peines dissimulées sous l’audace supposée de l’humour, rôles des adultes et des enfants interchangés : tout est là pour nous toucher. Parfaitement moulé dans ce schéma, Boy feint la bizarrerie de son point de vue (celui d’un gamin) pour offrir une histoire convenue qui n’a d’original que son cadre.
Dans un petit village de la côté néo-zélandaise, le petit Boy vit avec ses frères et cousins, bercé par l’illusion que son père absent (incarcéré) est une sorte de super-aventurier en vadrouille. L’été arrive et avec l’école qui se termine s’ouvre un espace à combler : la grand-mère quitte la bourgade pour se rendre à un enterrement, laissant à Boy la charge de la grande fratrie. Profitant de cette béance, la fiction fait surgir le personnage du père, Alamein, qui n’est autre qu’un voleur perché à la recherche de son butin enterré dans une prairie – il ne sait plus exactement où. C’est dans cet intervalle (absence de la grand-mère et retour du père) que s’installe l’intrigue de Boy, comme une succession de saynètes racontées du point de vue de l’enfant qui rencontre enfin son père. De cet angle a priori décalé naît l’absurdité permanente du film : toute enfantine, agrémentée d’intermèdes animés qui donnent à voir, littéralement, l’imaginaire des protagonistes (des enfants).
Avec ce parti pris qui pourrait être original, Boy s’enlise dans une surenchère assez creuse qui joue à plein sur le sentimentalisme et l’attendrissement du spectateur. Ce qui doit toucher dans l’histoire ce gamin trop sensé et de son père trop immature est le décalage que, de leur petit village maori, ils incarnent face au monde et face à eux-mêmes. Toutes les tensions potentielles sont épuisées par ces impératifs : l’intrigue et ses boutades permanentes rappellent que rien de ce qu’on voit n’occasionne la moindre surprise. Convenu de bout en bout, Boy est plein de références pop que le film est incapable d’incarner autrement que par de banales et répétitives citations qui renvoient à d’autres univers. C’est une peine, pour un film qui avait la bonne idée de conjuguer la vision d’un enfant grandissant au début des années 1980 au milieu de nulle part à la culture maorie de ses personnages, acteurs et créateurs.