Des jouets mis au rebut qui doivent sauver une poupée : le cinéaste d’animation Jiří Barta montre que le film de marionnettes tchèque n’a plus l’ambition d’antan, et qu’il est des personnages qu’il ne faut peut-être pas sortir du grenier.
Avec des réalisateurs comme Jiří Trnka dans les années cinquante, ou Jan Svankmajer la décennie suivante, le « ciné-marionnette » s’est imposé comme un véritable genre au sommet duquel se situait l’école tchèque. En 1959, Trnka offrait à ses poupées un rôle dans une pièce shakespearienne, avec Le Songe d’une nuit d’été, et mettait à leur service des moyens techniques dignes des stars hollywoodiennes, les filmant en Eastmancolor, et surtout en Cinémascope. Loin de cet âge d’or, pendant lequel les cinéastes disposaient de moyens importants et de techniciens hors pairs, Jiří Barta continue à explorer ce type d’animation. Depuis vingt ans, le cinéaste, pourtant très reconnu, a beaucoup de mal à financer des projets. On peut se souvenir de son film Krysar, qui, en 1985, reconstituait toute une cité médiévale pour raconter l’histoire bien connue du joueur de flûte de Hamelin.
Dans Drôle de grenier, point de transposition temporelle, l’action se passe de nos jours, ou plutôt dans une espèce de passé proche un peu flou, puisque les personnages sont des jouets ou objets mis au rebut dans un grenier. Dès que les simples mortels ont le dos tourné, la farandole des jouets se met en branle. Dans cette petite communauté, une poupée de porcelaine vit sa vie en compagnie des personnages masculins, une marionnette de soldat, un ourson aux yeux ronds, et une boule de pâte à modeler, tous éperdument amoureux d’elle. Le kidnapping de cette poupée par un horrible personnage de buste d’un kitsch extrême, oblige toute cette société à quitter le coffre à jouets qui lui sert de logement pour partir à l’aventure.
Mais ce qui tient lieu d’aventure est d’un convenu absolu, et enfile, les unes après les autres, toutes les étapes obligées d’un tel récit. Là où les témoignages de l’équipe du film parlent de nostalgie, de suranné, on a envie de répondre poussiéreux, vieillot. De plus, la version française est absolument catastrophique, ce qui devient proprement insupportable dans les séquences de prise de vue réelle avec les vrais acteurs que sont une petite fille, sa grand-mère et leur chat. Si on ne peut pas nier que la réalisation soit méticuleuse, et fasse preuve de recherche, notamment en diversifiant les procédé d’animation utilisés, on pense souvent à toutes les belles et simples inventions de Tsuneo Goda dans Komaneko, le petit chat curieux, sorti l’année passé, qu’on aurait aimé voir ici, et qui font défaut. On est étonné, et parfois consterné, de voir que tous les clichés de la poésie d’un passé jauni à la petite semaine tiennent dans tous entiers dans un coffre à jouets, qu’il aurait peut-être mieux valu laisser au grenier.