C’est dans un trafic urbain bruyant, rapide et réglé qu’Albert Dupontel a choisi de placer l’action de son dernier film : son SDF vit dans un cabanon de la périphérie, hors d’une ville au fonctionnement millimétré, et devient malgré lui un redresseur de torts, un joli cœur, un super-héros aux dents jaunes. Entre l’image tremblante digne d’un film Dogma raté et une musique rock assez répétitive pour finir agaçante, l’originalité du réalisateur de Bernie n’attire plus.
Plus qu’un film, Enfermés dehors est une suite de péripéties défiant toutes conventions dramatiques, ce qui, en soi, aurait pu être intéressant. Mais à force d’images coup de poing et de cascades trop invraisemblables et trop peu inspirées pour être comiques, cet objet cinématographique devient une compilation d’idées plus ou moins bonnes.
Le personnage clochardisant d’Albert Dupontel trouve une tenue de policier, s’en empare pour manger à la cantine du commissariat, rencontre une jeune femme dont les beaux-parents ont enlevé un enfant, puis un chef d’entreprise malhonnête, et tombe d’un bus, d’un toit, se fait renversé par plusieurs motos… il est donc très occupé. Mais on ne parvient pas à s’intéresser à une histoire qui part dans tous les sens et dont on prévoit dès le départ le dénouement romantico-banal.
Il est fort dommage, en outre, de voir qu’un réalisateur si imaginatif n’arrive pas à créer la moindre atmosphère : il se contente de gros plans rapides à la Jeunet, et tente de donner un semblant de rythme en filmant sans cesse des véhicules de toutes sortes qui finissent pour la plupart dans le décor, et surtout en utilisant une musique on ne peut plus oppressante qui cherche sans succès à cacher un manque d’inspiration visuelle. L’ensemble forme une espèce de long clip où l’on chute, où l’on crie, où l’on geint, toujours sans raison valable.
Quelques seconds rôles parviennent à sortir du lot pour nous reposer un instant et même, ô comble de bonheur, nous faire rire : Yolande Moreau apparaît ainsi en clocharde grognon mangeuse de pommes et Jackie Berroyer en amateur de films X sur les césariennes avec complication. Mais ces rares moments ne réussissent pas à masquer la véritable identité du film : celle d’un mélange non maîtrisé qui finit par ennuyer ferme.