Une chanson traditionnelle québécoise introduit les deux parties de Genèse, d’abord chantée par Guillaume se donnant en spectacle devant ses camarades en classe, puis par des musiciens qui jouent pour un public d’enfants. Son caractère rassembleur et entêtant véhicule les émois de la jeunesse sur lesquels les deux temps du film, en usant d’un certain didactisme, se concentrent. Dans un premier temps, le film suit parallèlement deux personnages : Guillaume, jeune homme dont l’assurance frôle l’arrogance, qui s’avère être amoureux de son meilleur ami, mais aussi Charlotte, sa demi sœur, qui quitte son petit copain pour un homme plus âgé. Rarement seuls, c’est au fil de nombreuses situations de groupe que les personnages se déterminent – Guillaume en classe ou en cours de sport, Charlotte dans des fêtes –, et que se révèlent leurs personnalités à la lumière de leur rapport aux autres. En gardant toujours une distance avec son sujet, Philippe Lesage déploie un éventail de sentiments et plonge avec nuance dans les tourments de l’adolescence. Il insiste toutefois sur la charge émotionnelle de certaines circonstances à grand renfort de musique, lorsque reviennent à plusieurs reprises les mêmes morceaux empreints de mélancolie. Au bout du compte, après avoir connu l’attraction, la séduction, le rejet, le sexe consenti et non consenti, les deux jeunes gens subissent les conséquences – douloureuses et injustes – de leurs actes et sont renvoyés à leur solitude.
Centrées autour de nouveaux personnages, les trente dernières minutes mettent en scène la naissance du sentiment amoureux dont elles tendent à valoriser la pureté et, en comparaison avec les précédents événements, la légèreté. Lors d’une soirée en colonie de vacances, Béatrice et Félix, installés avec d’autres enfants autour d’un feu de camp, s’échangent sourires et regards, tout en participant avec entrain à l’animation des musiciens. Ce plan-séquence, là encore didactique, débute sa chorégraphie dans les flammes, illustrant le chamboulement intérieur qui se joue et sur lequel, soutenu par la frénésie de la musique, il va se focaliser. Le cadre bucolique est dévoilé, la caméra se concentre sur Béatrice, repasse par le feu pour se diriger vers Félix et, enfin, s’achève sur une vue d’ensemble. En se rapprochant des protagonistes, cette introduction contraste avec la distance maintenue dans la première partie mais continue de guider l’attention du spectateur. Elle considère l’évolution silencieuse et délicate d’un amour innocent qui constitue le sujet principal de cette dernière partie. Consacrée à des enfants aux caractères à peine esquissés, celle-ci s’apparente à un épilogue méditatif et chaleureux qui succède à l’étude froide et distancée de souffrances adolescentes, éprouvées par des personnages alors très définis. La construction narrative de Genèse trouve ainsi son équilibre et s’achève sur une note forte et sereine, qui malheureusement ne parvient toutefois pas à atténuer une méthode générale qui ne cesse de prendre le spectateur par la main.