Dure, dure, la vie de teen-idol : Kristen Stewart et Robert Pattinson, de la saga Twilight, ont respectivement servi à vendre des Runaways et Remember Me, projets qui, en dehors de leur présence, auraient probablement connu une bien moindre notoriété. De là à conclure que les projets dans lesquels sont impliqués ces jeunes acteurs ultra-populaires tablent tout sur la popularité de leur tête d’affiche, il n’y a qu’un pas. Avec en premier rôle le Zac Efron de High School Musical, star entièrement fabriquée par Disney, on pourrait en craindre autant de Secret de Charlie, qui vaut tout de même un tout petit peu mieux que ça. Un tout tout petit peu.
La tradition irlandaise, notamment, regorge de ces histoires : deux amoureux transis, face aux embûches multiples que leur tend la vie, jurent de se retrouver à une date donnée, quoi qu’il arrive. Et lorsque c’est la mort qui survient, cela n’empêche pas l’affligé(e) de rejoindre son conjoint – au grand effroi de l’intéressé(e), qui s’en va généralement rejoindre l’autre ad patres. Rien d’une telle noirceur dans ce Secret de Charlie : Charlie St Cloud est un jeune homme beau, sportif, fils responsable, frère aimant, homme de la maison depuis la disparition de son père, beau comme un dieu – n’en jetez plus. En partance pour l’université, il promet à son frère de le retrouver tous les soirs avant son départ pour s’entrainer au baseball. Lorsque le frère meurt dans un accident, Charlie s’aperçoit qu’il peut encore tenir sa promesse, et que son frère est retenu sur terre par cette même promesse. Plus encore : il est désormais capable de voir des gens-qui-sont-morts. Mais pour quelle raison Dieu (production américaine, vous vous souvenez ?) a‑t-il ainsi doté le jeune Charlie ?
Dans les années 1980, les studios télés Disney sévissaient déjà avec des productions télévisuelles à la morale omniprésente et aux rebondissements parfaitement téléphonés. Au premier abord, le Secret de Charlie semble être un digne continuateur de ces productions, avec, dans les premières minutes, la pose de toute les balises qui interviendraient dans le film – de celles qui permettraient de se raconter le film cinq minutes avant que n’interviennent les péripéties. Pourtant, à cet égard, le Secret de Charlie présente quelques surprises, en s’engageant sur des voies narratives pas forcément prévisibles, plus dignes dans leur noirceur des contes irlandais précités que d’une production Disney lénifiante. Au moins, le scénario du film ménage-t-il quelques places à un humour parfois étonnant, et à un fantastique de bon aloi.
Formellement, le réalisateur Burr Steers semble malheureusement prisonnier de son acteur principal : c’est ainsi que, en dehors d’un même plan de phare-et-côte-marine apparaissant à l’écran au moins quatre fois, Zac Efron est évidemment l’objet le plus souvent présent. Les fans seront, donc, comblé(e)s – cela faisait sans doute partie du cahier des charges, ici parfaitement respecté. Pourtant, on sent, de la part du réalisateur, une volonté de s’émanciper de l’ombre de sa teen star pour essayer de raconter un conte qui pourrait être intéressant ; une tentative, notamment, de donner de l’âme à des protagonistes d’une petite ville rurale des États-Unis – un peu à la manière d’un Stephen King à son plus tendre. Ainsi, l’ombre des « grands récits » de fantôme des années 1980 – 1990 plane sur le Secret de Charlie : Ghost, bien sûr, mais également le superbe et méconnu Truly, Madly, Deeply, où un Alan Rickman décédé mettait à rude épreuve la patience de son épouse en hantant leur appartement. Le Secret de Charlie a retenu les leçons romanesques de ce joli petit film, avec son slogan original : « Live, love, let go » (« Vivre, aimer, laisser partir ») – les histoires de fantômes nous parlent, avant tout, de notre incapacité à aller de l’avant lorsque la mort cristallise le passé. Le Secret de Charlie demeure une ode visuelle à sa star masculine, avec toutes les limitations que cela suppose – mais la volonté discrète de tirer le film vers autre chose qu’un vulgaire press book de Zac Efron est tout à fait méritoire.