Petit maître du néo-polar urbain, spécialiste de la descente aux enfers made in LA, David Ayer se risque ici à une variation expendablesque bis, lestée de ses habituels tics de réalisations (mélange des régimes d’images, montage ultra cut, lumière simili-brute pour mettre en relief les « gueules ») et du Gouvernator, avec son indécrottable accent austro-californien et une mine de plus en plus tapée. Enchaînant les échecs depuis son retour sur les écrans, le bon Schwarzy ne redressera pas la barre avec ce rôle de chef de meute, Sabotage ayant fait un four au box office nord-américain. Une fois cette information connue, restait à savoir si l’amateur d’action ou la belle âme nostalgique de Commando pouvait néanmoins en attendre une série B justifiant le déplacement.
Sois poli si t’es pas joli ? Raté.
Quinze minutes de film suffisent à fournir un début de réponse, tandis que le casting s’attaque gaillardement (et sans trop d’arrière-pensées parodiques) au record du nombre de « fuck » par réplique et de vannes grasses du type « Qui a lâché une caisse ?» (on est indubitablement chez les vrais). Sabotage est une boucherie assez vaine sur fond d’histoires de cartels et de magot dérobé, impliquant des agents des opérations spéciales de la DEA sévèrement givrés, commando de têtes brûlées marinant en vase clos. L’intrigue, qui laisse le bataillon de tatoués se déchirer tout en développant laborieusement une trame de revenge movie, se trouve conduite avec si peu de conviction qu’on en vient rapidement à se concentrer sur ce à quoi elle sert de prétexte, à savoir des fusillades et scènes d’action burnées et sanglantes.
Un art du bourrin lassant
Cet art du bourrin et de la sauvagerie mise en images avec une vulgarité revendiquée aurait pu avoir un côté réjouissant s’il recelait un minimum de distance, au-delà de quelques saillies humoristiques pas finaudes. Il eût sans doute aussi fallu que les personnages, attelage de têtes connues (Sam Worthington rasé de près, Mireille Enos en harpie badass, Terrence Howard dont on ne se souvient que vers la fin…), caractérisés vite fait à l’aide d’une série de surnoms édifiants, sachent susciter un peu plus d’intérêt. Difficile, à l’arrivée, de se passionner pour le sort de ces salopards moins cools ou asociaux que bas du front. Les excès et transgressions commises au cours d’un jeu de massacre qui ne lésine ni sur la barbaque ni sur les victimes collatérales n’ayant pas d’autre but que d’en rajouter une louche pour se distinguer dans le genre, l’ensemble se regarde presque stoïquement, jusqu’à devenir lassant. Si Sabotage semble parfois se rêver en étude à la Tony Scott, sa conclusion se rêve explicitement en règlement de comptes de western, rejoignant dans la douleur le fil narratif des premières images. Entre les deux, fait notable, on aura tout de même appris que les forces spéciales guatémaltèques sont les meilleures du monde et font cauchemarder l’élite des flics US. Fuck.