Après l’audacieux mais souvent pénible Ce que veulent les femmes, Nancy Meyers signe une comédie aussi crapuleuse que bon enfant. La mise en scène de The Holiday s’évertue à désamorcer progressivement les clichés qu’elle établit autant qu’à tracer des chemins scénaristiques dont on pensait avoir déjà fait le deuil.
Iris (Kate Winslet), ersatz de Bridget Jones, est rédactrice dans un magazine de mode londonien et amoureuse d’un brise-cœur nommé Jasper. Amanda (Cameron Diaz), créatrice de bandes-annonces, se révèle être son antithèse : américaine, joviale et plutôt musclée avec les mecs (ce qui vaut à Edward Burns le droit de se faire éjecter de la fiction dès le départ). Toutes deux ne se connaissent pas mais décident d’échapper à leur vie sentimentale catastrophique en échangeant leur maison le temps de remettre de l’ordre dans leurs histoires de cœur. Un compositeur de musique de films (Jack Black) – le trop bien nommé Miles – et un veuf geignard (Jude Law), le frère d’Iris, se chargent de combler leur manque affectif.
Chaque personnage est platement assigné à surmonter ses difficultés : pour Arthur Abbot, le scénariste à la retraite, c’est mettre de côté son déambulateur afin de gravir (littéralement ou pas) les marches qui le mèneront à une reconnaissance tardive de la part du tout venant hollywoodien ; pour Amanda, de verser des larmes; pour Iris, de se débarrasser de sa relation masochiste avec Jasper. Points culminants d’un film qui n’hésite pas à s’étirer lourdement : ces séquences ne sont que les phénomènes associés à une méthode d’écriture que Meyers applique en bon élève.
Ce que veulent les femmes parvenait à être original grâce à un Mel Gibson qui était devenu le terrain de jeu des pensées féminines : celles-ci venaient s’y cogner les unes aux autres, à la manière d’autos tamponneuses. Ici, les voix-off d’Iris et d’Amanda restent sagement à leur place et divisent de ce fait le film en deux parties, ce qui suggère en toute logique une fin unificatrice. Car l’objectif de Meyers est de rétablir les liens sociaux à la manière d’un démiurge, procédé contre lequel John Cassavetes avait bâti sa carrière. En travaillant à l’inverse de ce cinéma rassurant, il prouvait qu’on pouvait faire une comédie où les problèmes de couples ne se règlent pas forcément : (Husbands en est l’exemple parfait).
Ce qui est scandaleux avec The Holiday, c’est cette faculté à se propulser dans l’avenir en sacrant Eli Wallach au cours d’une cérémonie. Qu’un film aussi insipide puisse contenir le désir d’honorer un de ses acteurs d’un oscar est typique de la production américaine actuelle, suffisante et impatiente de se voir attribuer quelques distinctions. The Holiday porte ainsi la marque de fabrique d’une production qui s’efforce à se ranger du côté des classiques de la comédie, s’octroyant d’avance la mention très bien.