« Même livrée rapidement, une mauvaise pizza reste une mauvaise pizza…»
… les congés de fin d’année approchant, on a pensé un temps servir cette ample réflexion en guise de critique façon 30 mots maximum plutôt que de jouer les Cyrano, mais il existe un juste milieu. Comme il n’est pas inutile de connaître le menu, résumons : Jesse Eisenberg plus Ruben Fleischer, c’était jusqu’ici la formule gagnante du très ludique Zombieland, application US de la méthode Shaun of the Dead et récente illustration du bourgeonnement (c’est le mot) actuel de cette veine comique tout sauf inédite qui installe le geek aux commandes de sa friandise fictionnelle (avec entre autres figures de proue le sus-nommé Eisenberg Jesse, icône entre-temps établie par sa remarquable interprétation du Nerd in Chief) : du cinoche pour, par et avec des geeks, au sens (très très) large du terme. Du marrant et du malin, aussi, souvent – jusqu’au jour peut-être pas si lointain où la mise en abyme et les jeux (auto)référentiels finiront par gonfler à nouveau tout le monde.
Bref, 30 minutes maximum, avec son histoire de livreur de pizza transformé en bombe humaine par le rejeton vaguement dégénéré d’un ancien Marine blindé d’oseille, se devait d’être une réjouissante comédie – voire, après deux trois packs de bière, de prétendre comme Zombieland au micro-culte. Ce qu’il n’est pas, mais alors pas du tout, tant le film peine à arracher quelques sourires et se révèle dépourvu d’inspiration. La petite équipe ne ménage pourtant pas ses efforts ; Jesse Eisenberg n’a rien perdu de son abattage et de son débit si caractéristique, la minorité risible Aziz Ansari vibrionne, Danny McBride est toujours aussi lourdingue (n’est pas Will Ferrell qui veut)… Mais naturellement, plus ce joli monde insiste, moins il y arrive, et l’on essaye en vain de s’intéresser aux rebondissements de l’intrigue.
Qu’advient-il quand deux débiles de trente ans amateurs de bombes artisanales se retrouvent à martyriser deux petits malins de vingt-cinq bercés au Call of Duty ? Un film où ces premiers, ados attardés devenus héros d’aventures parodiques et dont le « donquichottisme » puise aux « meilleures » sources eighties (le film convoque en vrac Point Break, L’Arme fatale, Vendredi 13 ou Piège de cristal, sans oublier Le Flic de Beverly Hills via la résurrection de Glenn Frey et son « The Heat Is On »), se font gentiment rétamer par ces derniers, tandis que des seconds rôles laborieux peinent à apporter un brin de folie comique. En résulte une comédie poussive, téléphonée et assez insipide, qui ne parvient pas même à créer le sentiment confortable (pour sa cible supposée) de sympathie avec un univers de connaissance.
Rien d’impardonnable en somme, mais que dire d’une comédie une fois qu’on a dressé le sombre constat qu’elle ne fait pas vraiment rire ? Rien, et c’est sans doute ce qu’il faut retenir de cette inoffensive deuxième tentative de Ruben Fleischer, qui ne cesse jamais de s’efforcer d’être drôle : il n’y a rien à en conserver, si ce n’est la certitude renouvelée que même avec la meilleure volonté du monde, même en s’y mettant à deux, à quatre, à vingt, quand ça veut pas, ça veut pas. Et puis 30 minutes maximum dure quand même une heure vingt-trois ; si c’est pas de la publicité mensongère…