Echo Park, L.A., dernière révélation du festival de Sundance, doit son nom à un quartier de Los Angeles où la communauté latino est particulièrement implantée. Mais depuis quelque temps, l’immobilier ayant tendance à flamber, certains locataires sont contraints de partir, remplacés par des Américains pure souche. Magdalena est une jeune fille qui s’apprête à fêter sa quinceañera, la cérémonie qui marque ses 15 ans. Vierge enceinte et rejetée par son père, elle trouve refuge chez son grand-oncle, où elle retrouve son cousin Carlos, lui aussi rejeté par sa famille. Les deux réalisateurs livrent un film aux thématiques sensibles, qui auraient pu virer au drame. Ils choisissent pourtant une mise en scène aux tonalités douces, plus propice à l’exploration des relations entre les personnages et des contradictions d’une communauté déchirée entre tradition et modernité.
Echo Park, L.A. s’ouvre sur une cérémonie qui est aussi tout un symbole: la cérémonie de la quinceañera, qui célèbre l’entrée dans la vie de femme d’une jeune fille, le jour de ses 15 ans. Dès cette ouverture, les thèmes principaux du film se dessinent. Il y a d’abord le conflit entre tradition et modernité: Eileen vient de fêter sa quinceañera, avec tout le folklore et les traditions qui l’accompagnent, mais c’est en limousine, avec ses amis et en écoutant de la musique moderne qu’elle se rend à la soirée. En termes de mise en scène, la rupture nette entre les deux moments en est la parfaite illustration. De même, l’irruption pendant la fête du frère de Eileen, Carlos, présenté comme un petit voyou et rejeté par son père, nous annonce que les personnages du film constituent une communauté dont il ne faut pas trop s’écarter des valeurs sous peine d’être renié et ignoré.
C’est la situation que vit Carlos et que s’apprête à vivre Magdalena, la jeune héroïne du film. Magdalena fréquente un jeune garçon et se retrouve enceinte. Choqué, son père la rejette, d’autant plus irrité que sa fille nie avoir eu des rapports sexuels. Elle trouve alors refuge chez son oncle Tomas, où elle y retrouve Carlos. La suite du film consiste en la trajectoire de ces deux personnages, de leur vie à la fois dans et hors de leur communauté, êtres à part que les réalisateurs observent avec une grande tendresse. Magdalena tente de poursuivre sa vie de collégienne, tandis que Carlos devient l’amant de l’un de ses voisins, qui est aussi le propriétaire du logement de son oncle. Autant d’enjeux dramatiques qui auraient pu mener au drame. Souvent, dans le film, on s’attend à ce moment où tout va basculer. Pourtant, les moments de tension sont toujours désamorcés par le récit et par la mise en scène des deux réalisateurs.
Echo Park, L.A. se présente en effet plus comme une chronique de vie, une observation de la société, comme en témoignent les scènes particulièrement documentées – et pour cause, Wash Westmoreland ayant élaboré l’histoire du film après avoir officié comme photographe pour la quinceañera d’une de ses voisines – des fêtes traditionnelles. À mi-chemin entre la fiction et le documentaire, le film, centré sur quelques personnages d’une communauté qui nous est pour la plupart éloignée, en devient paradoxalement très émouvant. Si Glatzer et Westmoreland se basent d’abord sur des faits de société et une observation de la dimension sociale de leur environnement, leur film se recentre peu à peu sur les relations entre les personnages et sur leurs sentiments intérieurs, questionnement qui touche à l’universel. Ainsi, l’avenir de l’oncle Tomas, menacé d’expulsion, et les relations de Magdalena et de Carlos avec leur famille deviennent les vrais et principaux enjeux d’un film qui apporte avec talent un peu de douceur à des questions sensibles. L’histoire se déroule à Echo Park, mais aurait pu être située à bien d’autres endroits. Richard Glatzer et Wash Westmoreland nous prouvent qu’un film pertinent repose avant tout sur des personnages intéressants. Si c’est ce qui a séduit le festival de Sundance, c’est plutôt bon signe.