Si le sujet laissait présager le souvenir de quelques films-catastrophes similaires – à mi-chemin entre Twister et Pluie d’enfer – le résultat n’est pourtant pas si déshonorant. Il émerge au contraire un goût de frustration, notamment dû à une intrigue un peu trop balisée et convenue – le casse d’un coffre-fort fédéral pendant l’ouragan du siècle, contre lequel se dressent un brave météorologue qui a tiré son obsession des tornades d’un traumatisme d’enfance (la mort brutale de son père, sous ses yeux), assisté de son frère et d’une militaire zélée.
L’action au parfum des années 2000
Au rang des pots cassés se situent finalement les éléments accessoires de ce type de film d’action – l’intrigue, donc (dont s’était d’ailleurs débarrassé Twister au point de s’en tenir à la substance même de son récit, une chasse aux tornades effrénée et absurde), et la teneur des personnages, consternante de banalités et frisant même l’auto-parodie non intentionnelle.
Côté action, le sentiment reste mitigé. C’est que le savoir-faire de son réalisateur, Rob Cohen, ne se décèle pas vraiment dans sa direction d’acteurs ni dans son sens de la narration sans raffinement (à base de gros plans insistants et de transitions sur fin de réplique percutante). Sa maîtrise (sans parler nécessairement de talent) se situe toutefois dans sa manière de générer, à l’insu de son sur-découpage nerveux, assez de temps et d’espace pour y glisser des corps en mouvement ; corps d’action bravant ponctuellement les lois de la gravité sans que cela ne soit trop apparent, donnant l’impression de flottements absurdement rationalisés. Deux séquences en témoignent : l’une où les héros, pourtant aspirés par la tornade, tirent avantage de la situation ; une autre où ces mêmes héros, poursuivant le camion des voleurs, s’accrochent in-extremis au dos du véhicule, dans un unique plan-séquence.
Récolter la tempête
La véritable déception de Hurricane tient finalement dans sa manière de réduire la tempête à un simple arrière-plan, et non un véritable accessoire au service du récit, à l’exception de trois scènes : la première où le brouillard sert de cachette et où le vent aide au lancer de projectiles ; la seconde où la pression atmosphérique permet aux héros d’échapper à leurs ennemis en se laissant aspirer (séquence décrite précédemment) ; la dernière, honteusement copiée sur Mad Max : Fury Road, où le héros, poursuivi par la poussière de la tornade, tente d’y piéger les braqueurs. Hormis ces quelques passages, le film ne définit pas vraiment un nouveau rapport à l’espace par l’exploitation de ses possibilités météorologiques. Au lieu de profiter de la tornade pour exécuter le plan (faciliter les déplacements, orienter l’espace, soulever le matériel), les truands réalisent le braquage en dépit de sa présence, à quelques raccourcis scénaristiques près (ville désertée, électricité capricieuse).
Le film est ainsi déchiré entre deux lignes distinctives. D’un côté, des séquences d’action recyclées et déjà vues mille fois, imposées coûte que coûte par la mise en scène nerveuse de son réalisateur (les fameux plans vibrants déjà mis en place dans le premier Fast and Furious pour maintenir artificiellement l’intensité). De l’autre, un arrière-plan au potentiel cinétique inachevé, sacrifié au profit d’un schéma manichéen un peu forcé. On aurait préféré suivre les truands semer le vent et en récolter, au sens propre, les fruits.