Pour son nouveau long-métrage, le réalisateur Louis Leterrier – qui a fait ses armes auprès de l’écurie Luc Besson en signant entre autres Danny the Dog et plus récemment Le Choc des Titans – s’entoure d’un casting prestigieux qui se présente comme le facteur décisif de son succès international. Seulement, cela suffit-il à créer définitivement l’illusion ? Verdict.
Un groupe de brillants illusionnistes – « Les Quatre Cavaliers » – réussissent en temps réel deux tours spectaculaires de magie : en braquant une banque située sur un autre continent et en distribuant auprès du public la fortune d’un banquier véreux. Deux agents spéciaux du FBI et d’Interpol sont alors chargés de les interpeller, tandis que les quatre experts en magie menacent de récidiver avec un tour encore plus grandiose.
D’entrée de jeu, Insaisissables se présente comme le film hollywoodien estival calibré pour fonctionner comme un pur divertissement, dont l’efficacité reposerait à la fois sur ses nombreuses scènes d’action et sur le fonctionnement de son intrigue générale, articulée comme un véritable tour de magie : rien de ce qui est vu ne doit être considéré comme définitif. Seulement, en jouant délibérément sur les faux-semblants comme pour mieux créer l’illusion et berner le spectateur, Insaisissables trahit rapidement l’artificialité de ce qui pourrait se présenter, au premier abord, comme ses plus belles cartes.
Conçu en effet comme un véritable tour de magie, dont le spectateur serait à la fois le public et la victime de l’illusion, ce nouveau long-métrage de Louis Leterrier tombe rapidement dans un piège archétypal qui laisse peu de place au doute quant à l’efficacité de son dispositif dramatique. Élaborée comme une course contre la montre opposant l’ingéniosité de nos quatre cavaliers au flair des policiers, l’intrigue principale du film se voit contrainte d’utiliser la vraisemblance pour mieux faire valoir l’aspect spectaculaire de ses tours de magie, organisés comme des scènes d’action autonomes ou comme des divertissements isolés à l’intérieur d’un grand « show » général. Seulement, ces tentatives d’illusion tournent rapidement à l’échec en écartant justement ce qui pourrait épaissir le fil conducteur du film et maintenir son intérêt, à savoir la question inévitable du « pourquoi » et du « comment » censés guider les actions de notre quatuor.
Une telle négation des réels motifs de nos quatre apprentis braqueurs place dès lors le spectateur dans une situation délicate, se voyant contraint de porter une méfiance constante envers les personnages principaux, dont l’aspect de justiciers des temps modernes se trouve sans cesse remis en question. Il en résulte une construction des personnages sans véritable profondeur, dont la spécificité technique tient lieu de construction psychologique, entre l’expert en cartes et bavardage (dans le rôle duquel nous retrouvons sans surprise Jesse Eisenberg) et la sculpturale Henley (interprétée par Isla Fisher), qui joue de son charme pour mieux hypnotiser son audience. Si le film parvient néanmoins à maintenir l’intérêt durant quelques scènes d’action, c’est donc davantage grâce à l’efficacité d’un montage qui tente de privilégier les plans panoramiques et aériens, comme pour mieux renforcer la brève illusion d’une caméra omnisciente. « Approchez, plus vous croirez en voir, plus vous vous ferez avoir » ; peut-être fallait-il prendre au sens le plus strict l’avertissement énoncé par le jeune J. Daniel Atlas (Jesse Eisenberg) au début du film.