Elle s’appelle Sarah. Elle est fiancée à un jeune avocat un peu terne, mais se laisse draguer par Kevin Costner (désolé, on a oublié le nom de son personnage), qui a déjà obtenu dans le passé les faveurs de sa mère et de sa… grand-mère. C’est dire s’il est séduisant! En même temps, la villa avec piscine et la Porsche, ça aide… Quant à la rumeur du titre, on n’a pas bien compris ce qu’elle venait faire là. Mais pas question de se dévouer une deuxième fois pour creuser le problème.
On aime bien Rob Reiner, même si, d’aussi loin qu’on s’en souvienne, son film le plus réussi – le tendre et féerique Princess Bride – date de… 1987. On a une vraie tendresse pour Jennifer Aniston, et pas seulement parce que la Rachel ultra-gâtée et ultra-élégante de Friends était notre personnage féminin favori : dans The Good Girl, la jolie blonde interprétait une péquenaude paumée avec beaucoup de retenue et de sincérité. On aime énormément Shirley MacLaine, bien que sa deuxième carrière, en « actrice-ridée-qui-fait-semblant-de-ne-pas-accepter-son-âge », soit très mal partie (prétendons n’avoir jamais vu sa fausse prestation dans Ma sorcière bien-aimée). On adore George Clooney et Steven Soderbergh, ici producteurs, qui nous ont habitués au plus haut standing dans le genre de la comédie de copains commerciale. On accepte même de donner un petit accessit à Kevin Costner, parce que dans le genre cinquantenaire sexy, on ne fait pas beaucoup mieux à Hollywood (Paul Newman et Robert Redford restant hors catégorie).
Alors, pourquoi, malgré ce générique prometteur, n’aime-t-on pas, mais alors pas du tout, La rumeur court… ? Sans doute parce que, non content d’avoir réalisé une comédie romantique de plus (mais où sont les Lubitsch, Wilder et Cukor d’aujourd’hui et de demain ?!), prétendument inspirée du cultissime Lauréat, Rob Reiner tente vainement de l’assortir d’une vieille morale tirée de derrière les fagots, type « la passion c’est sympa, mais mieux vaut épouser son meilleur ami histoire de faire durer le couple ». Cher Rob, te souviens-tu de Jane Austen ? Dans son magnifique Raison et sentiments, écrit au XIXe siècle, il y a plus de cent cinquante ans, la grande écrivaine avait déjà bien éclusé le sujet. Tu comprendras alors que dans ta lamentable tentative d’occuper son terrain, il eût été plus malin de dégoter un scénariste capable d’écrire au moins une scène relevant la sauce dégoulinante de tes quatre-vingt quinze minutes interminables. Parce que c’est toi, et surtout parce que ce sont eux, on veut bien oublier très très vite La rumeur court… Mais s’il te plaît, ne recommence pas.