On n’attendait pas grand-chose du Règne animal de Thomas Cailley, auteur du très surfait Les Combattants, petit hit de la Quinzaine en 2014. Force est de constater que son deuxième film s’avère (légèrement) plus prometteur. Cailley concocte un teen movie à l’argument fantastique : pour une raison mystérieuse – il est brièvement question d’un virus, mais le récit ne s’appesantit pas sur la question –, des individus mutent en « bestioles » à moitié animales (poulpes, loup, singes, caméléons, etc.). En se concentrant sur un adolescent, Émile (Paul Kircher), le récit déplie une métaphore attendue (la puberté comme théâtre de transformations) et non dénuée de certains clichés du cinéma de genre contemporain, très porté sur la body horror – on pense en particulier à la scène, héritée de La Mouche, où un ongle arraché illustre la métamorphose d’un corps hybride (il serait temps d’en finir avec ce passage obligé, que l’on retrouve dans Junior, Teddy ou encore Tiger Stripes, présenté en mai dernier à la Semaine de la critique).
Plus étonnante est la manière dont Cailley s’inspire, à une certaine échelle, de l’atmosphère malade du Black Hole de Charles Burns, auquel il emprunte l’idée de communautés de néo-lépreux peuplant les forêts en marge d’une bourgade. Il manque manifestement au film un sens de la mise en scène pour dépasser le stade du scénario bien troussé, mais son alliage narratif sert tout de même d’écrin pour les interprètes, notamment Paul Kircher, dont l’air de batracien s’accorde parfaitement à son rôle d’adolescent gauche masquant sa monstruosité naissante.