Jill Culton a surtout fait ses preuves chez Pixar (Monstres & Cie, Toy Story, 1001 pattes). Rare femme dans ce monde terriblement masculin, elle réalise ici son premier long métrage, Les Rebelles de la forêt, avec « l’oscarisé » Roger Allers, le réalisateur du Roi Lion. L’histoire met donc en image des animaux loufoques qui parlent et tentent de sauver leur propre peau en faisant les imbéciles idiots. Sur cette trame se greffent des actions impertinentes et de rocambolesques mésaventures qui n’étonnent malheureusement pas, ou pas assez. Quant à l’animation, elle foisonne en tous poils… et voici comment…
Les Rebelles de la forêt est un film à cheval entre la 2D et la 3D, un désir d’unir deux techniques dans ce qu’elles ont de meilleur. La beauté de la ligne graphique traditionnelle, des ombres et de la profondeur de champ concourt ainsi à mettre en évidence l’image de synthèse. Si les personnages et les décors sont forcément animés en 3D, leur ligne, leur contour, leur éclat coloré doivent davantage au dessin animé. Inspiré directement des images d’Eyvind Earle, le peintre de décor de Disney (La Belle au bois dormant, La Belle et le clochard, Fantasia), Les Rebelles de la forêt trouve une esthétique originale et particulièrement réussie dans la conception d’éléments (feuilles, pelage, poils, chevelure) au premier abord statiques dans un film d’animation. Et la gageure réside alors en ce foisonnement de duvets, crins, fourrures et donne à tous ces personnages une dimension palpable. Boog l’ours apprivoisé, qui se retrouve hors de sa demeure et qui part découvrir bien malgré lui le monde de la forêt et ne rêve que de civilisations, a donc un pelage mouvant, qui glisse au fil du vent. Il en va de même pour son copain, Elliot le cerf, pour la jolie biche, le teckel, le hérisson, les castors, les lapins, les écureuils. Chaque fourrure a son rendu, très particulier. Les humains ne sont pas en reste et les barbes et autres chevelures permettent également de toucher au plus près du réel.
Ces prouesses techniques fort réussies trouvent ainsi leur monde à illustrer : les bêtes de la forêt. Et ce film en jouant de ces nouveautés pointe les relations ambiguës que les humains nouent avec les animaux. De la domestication à la chasse, Les Rebelles de la forêt fait ainsi le tour des pièges tendus par les hommes à ses inoffensives bestioles. L’ours n’a donc plus rien du caractère d’un ours après ces quelques mois passés auprès de son homo sapiens féminine. Mais, paradoxalement, les habitants velus de la forêt ont des attitudes trop humaines pour permettre de croire à la distance qu’ils instaurent avec l’ours apprivoisé. L’ouverture de la chasse n’est alors plus qu’une anecdote, les fusils, des jouets, et l’ambiance écolo ne trouve guère de profondeur pour dénoncer, provoquer, avertir. Mais à la fin du film, l’intérêt vient de là, il est difficile de savoir qui est le plus bête des deux : l’humain ou l’animal.
Entre une image très alléchante et un scénario qui ne surprend pas assez, Les Rebelles de la forêt reste un film d’animation un peu trop en surface. Bien dommage car la loufoquerie de certaines situations et les caractères bien trempés de Boog et d’Elliot sont une décapante trouvaille. À voir en famille.