Le plus jouissif dans Sea, No Sex and Sun, c’est repérer tous les succès populaires qui ont guidé les producteurs, tandis que le réalisateur/scénariste se laissait phagocyter par les chiffres d’entrées au box-office de ses modèles. Il vaut mieux profiter de ce jeu que de tenter d’aborder Sea, No Sex and Sun, un grand ratage qui, espérons-le, n’annonce pas les prochaines vacances estivales.
L’ambition de Sea, No Sex and Sun s’affiche dès ses premiers plans, qui présentent les personnages principaux du long-métrage : le mâle contemporain, à tous les âges de la vie ou presque. Un adolescent (Arthur Mazet), un jeune homme maqué mais faible et tenté par les incartades sexuelles (Fred Testot), ainsi qu’un quadragénaire divorcé flanqué de ses enfants intenables (Antoine Duléry). Hommes au bord de la crise de nerfs, tous confrontés peu ou prou aux mêmes situations amoureuses, malgré les générations qui les séparent : une réunion canaille autour du feu, sur la plage, constitue ainsi le rendez-vous commun qui annihile le temps.
Seule idée un tant soit peu intéressante à laquelle se raccrocher, tant Sea, No Sex and Sun irrite comme du sable dans les chaussures : d’abord, pour sa tendance à grappiller dans le réservoir des succès récents, dont il tire la plupart de ses ingrédients, de la typo « indé » du générique (Juno et ses dérivés, avec Arthur Mazet en Michael Cera) au comique adolescent des Beaux Gosses, qui n’arrache ici pas un sourire. Le lieu de villégiature, décevant et austère, que constitue Carnac, rappelle évidemment le Bergues de Bienvenue chez les Ch’tis. Que dire des atermoiements sexuels et amoureux des ainés, qui s’apparentent à une version apathique du Déclin de l’empire américain (c’est dire !) ? Tous deux sont dépourvus de charisme, et par ailleurs condamnés à des scènes extrêmement courtes, d’où ne transparaissent ni vélocité, ni écriture. Les réparties ont visiblement pris la mer en laissant ce petit monde en rade sur les plages bretonnes, enlaidies par une image dont on ne ferait même pas une carte postale. Les acteurs de Sea, No Sex and Sun eux-mêmes semblent peu convaincus par leur texte tant ils l’ânonnent sans conviction, à l’image d’un Fred Testot dont l’apparence et le jeu s’approchent de ceux d’un Bernard de La Villardière en Enquête exclusive chez les culturistes.
Si l’on a ri pendant la séance, c’était plus par gène : Christophe Turpin, en réalisant son premier film, a reproduit les erreurs de L’amour dure trois ans, dont il cosignait l’adaptation, plutôt que l’incongruité de Jean-Philippe, son premier scénario porté à l’écran. Comme le film de Beigbeder, Sea, No Sex and Sun se perd dans de vaines directions (l’affichage des SMS sur l’écran, totalement inutile) et en oublie de s’/nous amuser. On remerciera les distributeurs de ne pas nous infliger ce spectacle pendant l’été, tant il donne envie de se débarrasser de ses RTT.