Uberto Pasolini, ça vous dit quelque chose ? Non, non, Pier Paolo n’a rien à voir là-dedans (mais Luchino Visconti un peu plus : car Uberto Pasolini est son neveu. Oui, on s’emmêle un peu les caméras). Uberto, lui, peut se targuer d’avoir produit l’ultra-récompensé The Full Monty, c’est pas si mal. Sri Lanka National Handball Team est son premier film en tant que réalisateur. Les aficionados de handball voient venir l’arnaque : il n’y a pas d’équipe de handball au Sri Lanka. Bien vu : Sri Lanka National Handball Team raconte l’histoire vraie (si, si !) de vingt-trois Sri-Lankais en mal d’émigration qui montent de toutes pièces une « équipe nationale » de hand, afin de participer à un tournoi en Bavière… et traverser ainsi la frontière. Autant dire qu’ils sont aussi doués en handball que vous (pour la plupart je suppose, no offense) et moi. Uberto Pasolini choisit d’aborder le problème de l’immigration avec légèreté, dans un film plus touchant que drôle, et au fond sans grande originalité.
En 2004, une dépêche de Reuters fait état de la disparition d’une mystérieuse équipe nationale de handball du Sri Lanka. Après trois matchs, ses vingt-trois joueurs ont pris le maquis. Malgré les apparences, l’incroyable n’est pas qu’ils se soient évanouis dans la nature, mais qu’ils aient eu le cran de vraiment concourir à ce tournoi international sis en Bavière ! L’anecdote est drôle (quel culot, tout de même !) et grave (il est question d’immigration, attention), et fournit un pitch idéal pour Uberto Pasolini. Après tout, les castings improbables, il connaît : avant les faux handballeurs, il avait fréquenté les strip-teasers de The Full Monty. Le film se construit en deux parties : la première met en scène les tentatives désespérées de Stanley et Manoj pour obtenir un visa pour l’Allemagne, le hasard qui les fait tomber sur une invitation à un tournoi international de handball en Bavière, et le montage de cette mystification insensée : créer en quelques semaines une équipe de joueurs… professionnels. Direction la Bavière pour une seconde partie qui nous fait assister à ces improbables matchs, avant que chacun prenne son « envol ». Quant à la suite, c’est peut-être à Welcome, de Philippe Lioret, qu’il faudra la demander…
L’équipe de handball apparaît vite comme la métaphore d’une société caractérisée par d’importants mélanges culturels, religieux, ethniques. Mais le réalisateur et sa scénariste, Ruwanthie De Chickera (auteur de théâtre et metteuse en scène sri-lankaise), créent une sorte de microcosme composé de personnages stéréotypés, peu complexes mais attachants. La première partie a des ambitions « néoréalistes », comme le dit le producteur du film, d’après les propos que lui a tenus Uberto Pasolini : mais le néoréalisme a souvent bon dos, et il est un peu facile de l’accommoder à toutes les sauces. Que les acteurs soient non-professionnels ne suffit pas. Ils sont d’ailleurs plutôt bons, entraînés pendant plusieurs semaines par Damayanthi Fonseca, actrice reconnue du cinéma sri-lankais. Pasolini compose ici un tableau tendre et quelque peu naïf, qui se laisse regarder avec un certain plaisir, mais sans vraiment susciter la réflexion sur des questions sociales ou politiques.
Le « message politique » dont parle le réalisateur naît tout naturellement de ce pied-de-nez fait par ces vingt-trois Sri-Lankais à des politiques d’immigration qui les tiennent prisonniers chez eux. Mais le traitement quelque peu simpliste et emprunt de bons sentiments (l’union fait la force etc.) ne permet pas d’aborder vraiment les réalités de la société sri-lankaise, ni la question complexe de l’immigration. La deuxième partie alterne entre le comique assez sommaire des matchs et des scènes de pathos facile.
Sri Lanka National Handball Team est un film que l’on peut trouver divertissant, à condition de ne pas attendre de grandes originalités scénaristiques ou de mise en scène. On sourit plus qu’on ne rit, devant l’incroyable épopée de ces individus culottés plutôt sympathiques, et c’est sûrement l’idée même de cet incroyable culot qui nous intéresse, que son traitement proprement dit.
Inspirée d’une histoire vraie, la fiction a renoué avec la réalité, quand l’un des comédiens, peut-être trop possédé par son personnage, décida de se faire la malle à la fin du tournage, pour tenter lui aussi l’aventure occidentale. Mais contrairement à l’équipe de handball, le film grâce auquel il avait quitté son pays existe bel et bien. Non, non, cet article n’est pas un canular.