La première série chroniquée en ces pages de « romans pornos » n’avait pas à se forcer pour offrir une lecture alternative à la simple pornographie – recherche formelle et profusion esthétique marquaient les trois films proposés. Autant dire que ces préoccupations sont bien éloignées des trois nouveaux films proposés par Wild Side, bien plus littéraux, mais également bien moins intéressants.
La Leçon de choses de mademoiselle Meijika
Chusei Sone, réalisateur de deux films sur les trois de la précédente livraison chroniquée ici, semble toujours avoir quelques difficultés à définir son rapport formel au pinku. Dans le Journal érotique d’une infirmière et surtout dans Graine de prostituée, l’apport du cinéaste au genre était des plus intéressants, puisqu’il semblait à la fois se jouer du genre et légitimer celui-ci d’une façon originale. Cette Leçon de choses se voudrait certainement dans la même veine, mais se perd dans rapidement dans son intrigue de vengeance pseudo-policière. Pourtant, les scènes d’introduction et de conclusions sont des plus prometteuses – la première, par sa sauvagerie inattendue ; la seconde, par le constat final étonnant de la vacuité de la quête victorieuse de l’héroïne, par la corruption induite en elle par ses méthodes sensualistes et provocatrices. Une scène d’un érotisme triste, brusque, laid, qui clôt avec une étonnante mélancolie un film qui, d’autre part, mise beaucoup sur la brutalité physique et morale.
Fleur empoisonnée
Des trois films proposés dans cette livraison, ce film de Katsuhiko Fujii est peut-être le plus réjouissant. Ne cherchons pas ici la finesse formelle de Graine de prostituée ou du Doux Parfum d’Eros : au contraire, tout semble être fait pour aligner avec une bonne volonté confondante tous les thèmes récurrents d’un porno d’exploitation efficace. La liste est impressionnante – en dehors des scènes traditionnelles, déjà bien complaisantes, nous voici donc pourvus en : bondage, voyeurisme, saphisme, sado-masochisme, uniformes militaires (avec une apparition légère de l’imagerie nazie, pour bien faire), le tout enrobé de psychanalyse de bazar. Avec la bonne santé affirmée d’un film d’exploitation assumé, Fleur empoisonnée semble tout droit sorti d’un circuit underground, le tout paraissant aujourd’hui des plus naïfs. Finalement assez sage et presque attendrissant dans sa tentative de passer sur son festival de scènes érotiques un vernis intellectuel et scénaristique, Fleur empoisonnée relève presque de la cinéphilie, pour qui se préoccuperait d’archiver cet exemple de la pornographie la plus vigoureusement racoleuse.
Le Violeur à la rose
Si Fleur empoisonnée s’empêtrait dans sa tentative de proposer un scénario, ce Violeur à la rose ne semble pas s’en préoccuper le moins du monde. Essayons de résumer : le personnage principal est un jeune pompiste, en lien avec une mafia. Il rencontre un autre homme, plus sûr de lui, probablement tout aussi mafieux, qui l’initie à un plaisir méconnu : le viol. En parallèle, l’homme est poursuivi par un groupe, mafieux encore, dont le jeune chef désire profiter des charmes de ce violeur en série. Ce Violeur à la rose nous rappelle une vérité bien essentielle : les femmes aiment se faire violer, si elles font leurs mijaurées, c’est parce qu’elles aiment ça au fond – quitte à payer, après, pour revoir celui qui les a baisées de force dans une ruelle sombre. Ajoutez à ça une vision d’un archaïsme fabuleux de l’homosexualité, et vous vous retrouvez avec un film passablement nauséabond (ce n’est peut-être pas vraiment le propos), mais également, malheureusement, aussi symptomatique des désirs du public que peut l’être le foutraque Fleur empoisonnée.