Depuis de nombreuses années, on se délecte de nombreux cinéastes iraniens et de leurs œuvres poétiques ou réalistes, souvent les deux, délicatement corrosives et subversives. Face à une censure des plus sévères, l’implicite est par excellence l’arme de ces films qui nous ouvrent des fenêtres, à l’image de celles de la voiture de Ten par laquelle on voit Téhéran et la vie défiler, sur un pays dont la complexité et les tiraillements structurels éclatent aujourd’hui à la une de l’actualité. Fenêtres qui sont peu vues en Iran. Et parfois pas du tout, comme, par exemple, Shirin d’Abbas Kiarostami, dans lequel l’interprétation est pourtant assurée par les actrices les plus populaires du pays. Comme un symptôme précurseur des revendications actuelles, à Cannes était projeté On ne sait rien des chats persans de Bahman Ghobadi; un film tourné tout à fait clandestinement sur la musique underground dans la capitale, une œuvre qui porte aussi bien les aspirations des uns que les blocages des autres. Mais peut-il encore être question de cinéma aujourd’hui? Il n’est pas rien que ce soit un cinéaste iranien connu et populaire, en Occident et plus encore en Iran, qui se fasse le porte-voix en Europe de Mir Hossein Mossavi et d’une rue iranienne que l’on tente d’isoler du reste du monde. Vendredi 19 juin, Mohsen Makhmalbaf tenait à Paris une conférence de presse en compagnie de sa fille Samira. Ces derniers ont fait un point très instructif sur la situation d’un pays qui semble à la croisée des chemins. Avec ce mot doux et réconfortant, prononcé avec gravité et véhémence, qui est revenu à de nombreuses reprises: démocratie. Ce n’est pas sans crainte que l’on espère.