On le notait déjà dans ces pages : l’industrie du remake, du recyclage, de la resucée, de la réactualisation bat son plein, le plus souvent animée d’un mépris déguisé pour le matériau d’origine. Parfois, c’est plus flagrant. Ainsi, lorsque Sam Worthington envoie paître la chouette mécanique du Choc des Titans, c’est un camouflet direct infligé à son œuvre matricielle – sans pour autant que le film puisse prétendre détrôner celle-ci. Ô, joie sans mélange, I, Frankenstein s’avère faire également partie de la pitoyable famille des petits navets iconoclastes et mesquins.
It’s dead
Alors, on pourra certainement reprocher à l’auteur de ces lignes son passéisme geignard. À raison, sans doute : il n’est certainement plus dans l’air du temps de révérer les monstres de l’Universal, au premier rang desquels se trouvent la créature de Frankenstein et sa sublime promise. Le scénariste Kevin Grevioux (également auteur du comic book) tend pourtant une main pataude à ces vieux barbons poussiéreux : ainsi voit-on apparaître la chaise servant d’entrave à la créature dans les films de James Whale, tandis qu’un personnage lâche une série de « it’s alive » lourdement insistante. Même les fantasticophiles les plus rigides se voient salués d’un signe de tête, avec un jeu sur la dénomination du protagoniste, traditionnelle pomme de discorde.
Under et Overworld
I, Frankenstein s’inscrit dans une mythologie chrétienne pop, avec d’un côté les anges/gargouilles (mélange de figurants de 300 et de kitsch façon Caverne de la rose d’or) et de l’autre les démons (bien dans la tradition, masques caoutchouteux compris). Au milieu : les mortels, dont on se moque tout de même un peu. Ainsi, nous dit-on que la guerre entre les démons et les gargouilles doit rester secrète : lorsqu’on voit les déchaînements pyrotechniques qui accompagnent une confrontation, on peut tout de même s’interroger. Ce n’est ni la première, ni la plus grosse incohérence de script de cette resucée d’Underworld. Dans le rôle-titre, Aaron Eckhart fait un curieux choix de carrière, tandis que Miranda Otto en fait des caisses sous les voiles chatoyants de la reine des gargouilles, et que Bill Nighy fait un très acceptable et très cabotin prince démon. Heureusement, d’ailleurs, que ce dernier est là pour donner un peu de sel à cet indigeste mélange de raccourcis scénaristiques navrants, d’esthétique rococo surchargée et d’énervement pétaradant faisant office de progression logique. Marchant ouvertement sur les platebandes d’Underworld – avec la même propension à mépriser son matériau original –, I, Frankenstein manque des tics visuels et formels qui faisaient office d’identité dans la saga de vampires new-age. Résultat : un vomissement coloré ininterrompu, immature et stupide.