On ne présente plus Scrat, ce drôle d’écureuil obnubilé par son gland, ni même Sid le lémurien débile, Diego le dent-de-sabre émotif ou Manny le mammouth au grand cœur. Toute la ménagerie reprend donc du service pour un quatrième épisode, où la dérive des continents sert de prétexte à une virée nautique, entre attaques de pirates, îles aux trésors et découverte du mystère de l’Atlantide. Comment renouveler une franchise devenue un succès planétaire sans retomber sur les mêmes blagues, les mêmes situations? Telle est la question que les scénaristes ne se sont visiblement pas posée à la vue de la platitude consternante, autant narrative que visuelle, de cet opus loin de concurrencer les précédents.
L’adage du battement d’aile du papillon produisant un tsunami à l’autre bout de la Terre fonde la genèse de ce quatrième épisode. Désirant enterrer sa noisette chèrement gagnée, Scrat déclenche un cataclysme à l’échelle planétaire : la dérive des continents. La joyeuse clique (la famille mammouth et les deux célibataires de service) subit de plein fouet la déchirure de l’écorce terrestre et les vaillants mâles (Sid, Diego et Manny) se retrouvent seuls, flottant sur un gros glaçon. Leur mission (et donc l’axe dramatique du film) sera de retrouver les leurs, après avoir évidemment vécu des aventures hautes en couleur.
L’intérêt d’un film d’animation américain se révèle rarement être le scénario, L’Âge de glace ne fait naturellement pas exception à la règle. Toutefois, pour dynamiser les interactions entre le trio de personnages, apparaît un nouveau lémurien, la grand-mère de Sid, édentée et totalement givrée. Électron libre, elle aurait pu insuffler au film une énergie nouvelle et entrer en concurrence avec les saynètes de Scrat, absurdes et directement dérivées des dessins animés de Tex Avery et de Bip Bip et le Coyote. Mais la vieille folle fait de la figuration et aucun enjeu dramatique ne repose sur ses épaules. Surfant sur la mode des pirates au cinéma (merci Johnny Depp !), le film picore de-ci, de-là des éléments propres à l’univers de la piraterie en les incorporant au bestiaire de la série : un putois en lieu et place du drapeau noir, Scrat transformé en sculpture trônant à la proue du navire et l’inévitable carte au trésor. Cependant ces divers clins d’œil au genre n’évitent pas à L’Âge de glace de faire du surplace, tant les idées sont plaquées à l’écran, sans plus-value ni originalité. Les parties chantées (celle des pirates en tête) font penser aux pires moments musicaux de Disney et, ô, désespoir même l’hilarant Scrat pâtit d’un cruel manque de peps. Un comble !
Alors que certains films d’animation comme Toy Story ou Happy Feet usaient à plein des possibilités offertes en terme de mise en scène, L’Âge de glace ne propose que des champs-contrechamps plats, des plans statiques et un rythme d’asthmatique, bref une cinématographie bâclée. Quant à évoquer la 3D, impossible d’en parler, le film ayant été projeté pour la presse en 2D (?!). Mais à l’aune de ce que propose cet épisode, on est en droit d’imaginer une fois de plus qu’il ne s’agit que d’un argument purement commercial. Peu présent à l’écran, l’écureuil obsédé évite tout de même le naufrage au métrage en donnant une version étonnante (et revigorante) du mythe de l’Atlantide. Malheureusement pas suffisante pour emporter le morceau. Franchise en bout de course, L’Âge de glace 4 ferait presque oublier l’intelligence et la drôlerie de ses prédécesseurs. Le pire compliment pour une suite.