Grâce à Scrat le petit marsupial, la franchise L’Âge de glace bénéficie depuis quatorze années d’un capital sympathie intact. Et pourtant les suites n’ont pas toujours brillé par leur intérêt tant scénaristique que technique, loin, très loin d’égaler les productions poétiques de Pixar (Wall‑E, Là-Haut ou Vice-Versa) ou celles plus classiques mais de bonne tenue de Disney (La Reine des neiges, Zootopie). Alors même que le studio fondé par Steve Jobs a annoncé récemment vouloir stopper l’épidémie des suites, Blue Sky rempile lui avec un 5e volet des aventures de Manny, Sid et Diego.
Quinquies repetita
Cette fois-ci, Scrat découvre par hasard un vaisseau spatial et amorce inopinément le crash d’une formidable météorite sur la Terre, menaçant ainsi la survie de toutes les espèces vivantes. Si le pitch, anti-scientifique au possible, mais raisonnablement drôle, de la bestiole obsédée par sa noix devenant l’architecte du système solaire et le responsable d’une potentielle extinction de masse aurait pu être savoureuse, encore eût-il fallu que ce grand délire contamine les personnages restés au sol. Or, l’histoire terrestre se contente de suivre une banale migration géographique, parsemant çà et là des embuches et des rebondissements téléphonés.
D’une consternante platitude narrative confinant à l’ennui (et au déjà-vu), L’Âge de glace 5 n’ose rien : ni propulser les héros dans une fantaisie débridée, ni faire évoluer ses archétypes, encore moins s’essayer à faire se télescoper les deux récits. Quant à l’usage de la 3D, il n’est encore ici qu’une piètre manière de soutirer quelques deniers supplémentaires aux spectateurs, aucunement une plus-value esthétique. Bien qu’on ne puisse s’empêcher de se réjouir des péripéties grotesques de Scrat, les séquences sont si courtes, fugaces et déconnectées de la trame principale qu’elles soulignent à la fois l’indigence énorme des aventures du mammouth et consorts et le peu d’entrain des scénaristes et des animateurs à renouveler une recette qui a fait ses preuves. Timorée et répétitive, cette suite met à jour les limites de l’exercice consistant à resservir le même plat au public. Les ingrédients ont beau être les mêmes, la tambouille ne prend plus.
Ad nauseam
Au-delà du ratage, c’est surtout la pensée reproductive, le quasi-clonage qui dicte le développement des films d’animation qui explose à l’écran. S’adresser à des jeunes spectateurs ne signifie en rien les prendre pour des imbéciles. Balancer à quelques années d’intervalle des films, qui sous couvert de suites ne sont que des duplicatas, a fait son temps. Et la bienveillance qu’une créature peut susciter, Scrat en l’occurrence, n’est aucunement un blanc-seing pour manufacturer à la chaine des longs métrages dénués d’imagination. Si Marvel et sa cascade de films de super-héros flirtent avec ce syndrome de la photocopie, Blue Sky lui s’y vautre sans panache. On en oublierait presque qu’on a un jour aimé L’Âge de glace. Un comble !